Avec son maillage territorial et sa connaissance du tissu économique local, la gendarmerie est un maillon essentiel de la sensibilisation des entreprises, du recueil de leurs questions, de leurs inquiétudes et de leurs plaintes, mais aussi de la détection de potentielles menaces.
En seulement un quart de siècle, les effets conjugués de la mondialisation et du déploiement rapide des technologies de l’information ont conduit les acteurs économiques internationaux à se livrer une féroce bataille pour conquérir des parts de marché. C’est dans ce contexte incertain, que l’État a décidé, dès 2005, de mettre en place un dispositif d’Intelligence économique (I.E.) territorial, visant à soutenir les entreprises nationales. Fixée par la circulaire du Premier ministre du 15 septembre 2011, l’organisation actuelle du dispositif d’intelligence territoriale est placée sous l’égide du préfet de Région. Dans ce cadre, et en coordination avec les services de la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI), de la Direction du renseignement et de la sécurité de la Défense (DRSD) et du Service central du renseignement territorial (SCRT), la gendarmerie joue un rôle clé.
Elle s’intéresse en effet au volet défensif de l’intelligence économique, nommé Sécurité économique territoriale (SET), qui consiste à prévenir et à réprimer toute atteinte aux intérêts des entreprises installées dans sa zone de compétence. Grâce à son implantation territoriale, à ses compétences judiciaires et à ses expertises en matière de sécurité, de cybercriminalité ou encore de délinquance financière, la gendarmerie dispose d’une importante capacité de collecte d’informations utiles aux entreprises. Outre l’identification préalable des entreprises dites sensibles et la répression des infractions économiques constatées, l’un des principaux objectifs des gendarmes est de sensibiliser les chefs d’entreprise et les salariés en vue de les accompagner dans la mise en oeuvre d’une démarche d’« intelligence économique » visant à protéger leur patrimoine matériel et immatériel. En effet, depuis ces cinq dernières années, les « cybervulnérabilités » sont en constante progression. Le monde s’est numérisé et les entreprises sont de plus en plus connectées: sites Internet, réseaux sociaux, Intranet, fichiers, cloud, etc. Autant de vecteurs, aujourd’hui indispensables, qui contiennent de l’information sensible intéressant les cybercriminels.
Au sein de la sphère publique, la gendarmerie nationale agit en complémentarité des actions entreprises par la DGSI et le SCRT, au sein du ministère de ’Intérieur, et par la Direction de la protection et de la sécurité de la Défense (DPSD), au sein du ministère de la Défense. Au sein de chaque région de gendarmerie, on trouve un officier « référent intelligence économique », formé au cours d’un cycle spécialisé à l’Institut national des hautes études de la sécurité et de la justice (INHESJ).
Des sous-officiers « référents intelligence économique », formés en interne via le centre national de formation au renseignement opérationnel, sont également répartis sur l’ensemble du territoire métropolitain, en outre-mer, ainsi que dans les formations spécialisées de la gendarmerie. Ces militaires sont généralement placés au sein des cellules renseignement de chaque département et agissent en complémentarité des 260 gendarmes « enquêteurs en technologies numériques » (NTECH) du réseau Cybergend, piloté par le Centre de lutte contre les criminalités numériques (C3N).
Au sein de la direction générale, les personnels en charge de l’intelligence économique appartiennent à la Section sécurité économique et protection des entreprises (SECOPE), de la Sous-direction de l’anticipation opérationnelle (SDAO), créée en novembre 2013.
Pour les référents intelligence économique, l’activité au quotidien consiste essentiellement en un travail d’identification des acteurs, de sensibilisation et de renseignement. Ils disposent d’outils de diagnostic, mis à disposition par le Service interministériel de l’information stratégique et de la sécurité économique (SISSE), créé en 2016, parmi lesquels le logiciel DIESE (Diagnostic d’Intelligence Économique et de Sécurité des Entreprises). Celui-ci évalue les vulnérabilités de l’entreprise et son niveau de protection. Les référents sensibilisent également les entreprises aux risques cyber (réputation, juridique, etc.), notamment par la diffusion des documents de l’Agence nationale pour la sécurité des systèmes d’information (ANSSI). L’efficacité du dispositif repose aussi et surtout sur les partenariats tissés avec les acteurs du monde de l’entreprise. Début 2018, un plan Nièvre viticole, convention locale de coopération placée sous l’autorité de la Nièvre, a par exemple été signé, dans le but de développer les échanges entre la gendarmerie et les viticulteurs locaux, afin de favoriser la sécurité économique de la filière.
Au niveau national, une convention de partenariat en matière de sécurité économique a été signée en 2016 entre le ministère de l’Intérieur et la CCI- rance, afin de renforcer les échanges d’informations et de bonnes pratiques. De même, les échanges réguliers entretenus avec les fédérations professionnelles permettent d’associer les acteurs publics et privés dans les démarches d’intelligence économique et de renforcer la lutte contre les malveillances. Depuis 2005, ce sont plusieurs dizaines de milliers d’entreprises qui ont ainsi pu être sensibilisées aux risques et vulnérabilités qui les menacent.
Source: GENDCOM / Photos : M. Alexandre – BRC F. Garcia