« Force humaine » par essence, le contact est l’un des fondements de la gendarmerie. Au-delà de la Police de sécurité du quotidien (PSQ), l’Institution a souhaité s’inscrire dans une démarche de renouvellement du lien tissé avec la population, en rénovant l’enseignement de cette proximité et en le déclinant à l’ensemble de ses personnels.
Le concept de PSQ a été proposé par le gouvernement en 2017 pour faire face à une érosion constatée des liens entre la population et les forces de l’ordre. Déjà un an auparavant, l’ancien Directeur général de la gendarmerie nationale (DGGN), le général d’armée Richard Lizurey, déclarait : « La proximité, là où nous l’avons perdue, il faut la retrouver, et là où elle existe, il faut la renforcer. »
À la recherche d’une nouvelle proximité
Face à ce constat, l’ex-directeur général a souhaité réinventer la formation liée au contact au sein de l’Institution. En effet, même si l’exercice du métier de gendarme suppose d’avoir naturellement un goût prononcé pour l’humain, rien de tel que ces périodes privilégiées pour insister sur les savoir-faire et savoir être nécessaires à cette proximité. Ainsi, début 2017, il mandate François Dieu, professeur de sociologie et lieutenant-colonel de réserve en gendarmerie, à la tête d’un groupe de travail pour élaborer des propositions quant aux enseignements à dispenser. C’est sur la base du rapport rendu par le sociologue en juin 2017, que de nouveaux modules concernant le contact sont élaborés. Et puisqu’il ne s’agit « ni d’une affaire de genre ou de personnalité, ni d’une histoire d’âge ou de grade », comme l’explique François Dieu, la matière est intégrée aussi bien dans les formations initiales que continues.
Empathie et dialogue
La formation initiale permet « l’assimilation de principes et de valeurs susceptibles de construire une nouvelle personnalité par l’incorporation d’une culture professionnelle », souligne François Dieu. Aussi, les nouvelles formations proposées aux Élèves gendarmes (E.G.) et aux Élèves gendarmes adjoints volontaires (EGAV) mettent l’accent sur le contact. Cela se traduit notamment par une augmentation du volume horaire dédié à ce domaine et une assimilation à travers des mises en situation.
Auprès de ces jeunes recrues, l’enseignement insiste en priorité sur les notions de respect, de bienveillance, mais aussi d’empathie ; le contact se devant d’être sincère et désintéressé, bien qu’il puisse favoriser le renseignement. Il est primordial que le gendarme sache se mettre à la place de son interlocuteur. Dans cette logique, des techniques de communication sont dispensées aux élèves pour encourager le dialogue. « Nos jeunes ne savent pas toujours comment prendre attache avec quelqu’un qu’ils ne connaissent pas, comment nourrir une discussion. Mais ils ont à cœur d’accomplir leur mission », explique l’adjudant Magali Barrot, instructeur à l’école de gendarmerie de Montluçon.
Après avoir insisté sur ces valeurs en lien avec la déontologie et avoir accompagné les élèves sur leur aisance à l’oral, en faisant aussi appel aux techniques d’optimisation du potentiel, vient le temps de l’application. De nombreux exercices leur sont ainsi proposés au sein de brigades pédagogiques très réalistes. C’est l’occasion de mettre en pratique l’accueil, physique ou téléphonique, qui doit respecter la Charte établie en la matière. Ils travaillent aussi la personnalisation de leur approche face à des personnes vulnérables ou des victimes, notamment en cas de violences intrafamiliales.
Le commandement de la proximité
L’enseignement du contact a également été rénové à destination des futurs chefs, formés d’une part à l’École des officiers de la gendarmerie nationale (EOGN) mais aussi lors du Stage préparatoire au premier commandement (SPPC), dispensé au Centre national de formation à la Sécurité publique (CNFSP). Ces commandants d’unité en devenir auront en effet leur rôle à jouer en encourageant leurs personnels à tisser du lien et en favorisant les initiatives en ce sens.
La proximité est ainsi abordée dans l’enseignement de la gestion du service, afin qu’ils incluent des patrouilles dédiées au contact dans des lieux et tranches horaires réfléchis. Les futurs chefs apprennent aussi à communiquer à travers du media training. Comme les élèves gendarmes, ils travaillent l’utilisation des réseaux sociaux pour émettre des messages de prévention ou valoriser le travail de leur unité. Ils participent également à des mises en situation, où ils sont confrontés, par exemple, à des réunions concernant le développement d’actions spécifiques (dispositif de participation citoyenne, conseil local de sécurité et de prévention de la délinquance, etc.).
Par ailleurs, tout comme pour les E.G. et les EGAV, les futurs commandants d’unités ont invités à se montrer curieux vis-à-vis des particularités de la population et du territoire où ils seront affectés. En effet, la proximité passe aussi par la maîtrise de son environnement, autant professionnel que personnel, puisque le gendarme habite sur sa circonscription. Ainsi, élèves et stagiaires doivent élaborer une « monographie », document permettant d’établir un diagnostic sécuritaire et d’analyser les besoins. Le partenariat et le contact avec les différents acteurs locaux sont également abordés en formation initiale, où l’enseignement est enrichi par des interventions extérieures (élus, polices municipales, associations, etc.).
La proximité, tous concernés
La volonté de l’Institution de valoriser son lien avec la population est aussi particulièrement visible à travers la formation continue des officiers et des sous-officiers de gendarmerie. En effet, le contact est à présent évoqué à toutes les différentes étapes de la carrière. Le stage de recyclage des agents de police judiciaire au CNFSP en est un parfait exemple, avec des enseignements spécifiques : captation du terrain, gestion des contacts physiques et virtuels, conduite d’un entretien. Ces temps de formation permettent aux militaires, de profils et d’horizons divers, de se retrouver sur ces principes fondateurs, tout en échangeant sur leurs expériences.
Le rapport élaboré par François Dieu a aussi donné lieu à une formation en ligne consacrée exclusivement à l’entretien de ce lien entre l’Institution et la population. Intitulée « La gendarmerie au contact », elle reprend les principes et les déclinaisons de la proximité, à travers des fiches pédagogiques interactives s’adressant à tous les gendarmes.
Enfin, en parallèle de ces nouveaux modules d’enseignement, la gendarmerie a développé différents modes d’action en complément. La pré-plainte en ligne et la brigade numérique permettent, par exemple, de conserver un lien avec les populations enclavées ou absentes en journée et de faciliter l’accès au service public. La création de brigades de contact et de postes provisoires s’intègre également dans cette démarche proactive. Enfin, la mise en place de questionnaires de satisfaction à l’accueil des unités participe à cette volonté de la gendarmerie de renforcer cette proximité avec l’aide des citoyens.
Source: gendinfo.fr / Crédits photos: © D.R.