Le GEOINT est une discipline qui, grâce à l’exploitation de données géographiques de diverses natures, a vocation à apporter un soutien aux opérations. Se fondant sur les principes de cette discipline récente, la gendarmerie a développé un outil permettant d’appuyer les travaux des unités territoriales lors de la planification du Tour de France : l’outil VIAPROTECT.

Lors de chaque édition du Tour de France, la gendarmerie mobilise d’importants moyens afin de sécuriser l’itinéraire emprunté par la course. À cette fin, l’identification de chaque intersection située le long du tracé et la définition des moyens humains et matériels nécessaires à la sécurisation de ces intersections sont des enjeux.

La reconnaissance d’itinéraire : un travail fastidieux

Opération complexe de très grande ampleur, la sécurisation du Tour de France débute chaque année dès la fin du mois d’octobre, lorsque ASO dévoile le parcours de l’épreuve. S’engage alors pour les militaires des groupements concernés un long processus de planification qui débute par une reconnaissance de l’itinéraire de course. Un travail fastidieux et extrêmement chronophage pour les unités, comme le décrit le lieutenant-colonel Christophe Blanc, du Centre d’intelligence géospatiale opérationnelle (CIGEO) : « Après avoir identifié les intersections, les militaires doivent élaborer le dispositif qui sera mis en place sur chacune d’elles et collecter manuellement l’ensemble de ces informations. C’est un travail de forçat qui présente plusieurs risques : celui d’oublier des intersections, celui d’une mauvaise appréciation du risque, celui, enfin, que le jour J, le jalonneur désigné pour tenir la position ne retrouve pas une intersection mal identifiée. » Exposés à cette problématique, le lieutenant-colonel Blanc et l’adjudant-chef Lionel Wintenberger, du bureau BJ9 (géomatique) du Centre national des opérations (CNO), se sont attachés à développer une solution GEOINT, progressivement perfectionnée depuis 2018 : VIAPROTECT.

Des atlas d’intersections pour faciliter les reconnaissances

VIAPROTECT s’appuie sur l’exploitation de multiples bases de données géographiques et sur la fusion de ces données (de source ASO, IGN ou gendarmerie). Grâce à un traitement complexe, partiellement automatisé, cet outil permet de créer une base de données des intersections présentes le long de l’axe de course. La richesse des informations existantes permet également de nommer précisément chaque intersection. VIAPROTECT détermine pour chacune d’elles la position GPS, le point kilométrique de course et la commune ou la zone de compétence sur laquelle elle se situe.

La finalité de ces traitements est de produire pour chaque étape un atlas de reconnaissance des intersections présentes le long de l’axe de course. « Dans cet atlas, chaque intersection est cartographiée et organisée dans l’ordre de la course. L’utilisateur retrouve pour chacune d’elles tous les éléments d’identification (nom des rues, côté de l’axe, commune, PK…). Lors des reconnaissances, il n’a plus qu’à vérifier ces éléments et à se concentrer sur la définition du dispositif de sécurisation de l’intersection concernée (gendarme, barrières…). » Un système qui présente un avantage majeur, celui d’un gain de temps considérable. « Avant, pour chaque étape, la reconnaissance durait parfois plus d’une semaine. Désormais, elle peut être réalisée en une journée. »

Des atlas de barrières pour faciliter les échanges avec les services concourants

Au-delà de ces atlas de reconnaissance, les travaux conduits dans le cadre du développement de VIAPROTECT autorisent également l’intégration des données de planification. Une fois les reconnaissances effectuées, il est ainsi possible de produire des atlas des intersections où des barrières devront être mises en place. VIAPROTECT facilite ainsi les échanges avec les services partenaires, notamment les services communaux en charge de la mise en place des barrières aux endroits définis par les gendarmes.

Enfin, en intégrant dans la base de données des éléments comme le nom du jalonneur désigné, celui de son chef de sous-secteur, son numéro de téléphone ou encore des consignes spécifiques, ces données, augmentées des horaires de passage de la caravane et de la course, permettent de produire des fiches de consignes individualisées qui seront notamment fournies au jalonneur.

L’engagement de spécialistes au profit des unités territoriales

La contrepartie de VIAPROTECT est que sa complexité technique nécessite l’intervention de géomaticiens, ne permettant donc pas, pour le moment, de mettre l’outil directement à la disposition des groupements de gendarmerie départementale concernés. Le travail conjoint du centre d’intelligence géospatiale opérationnelle et des géomaticiens du CNO (bureau J9) permet cependant de fournir à chaque groupement et à chaque Centre zonal des opérations (CZO) des produits directement exploitables : atlas de reconnaissance, tableau des intersections, atlas des barrières, fiches de consignes, tableau de bord… Pour le Tour de France 2023, ce sont ainsi plus de 14 366 intersections qui ont été cartographiées sur les plus de 3 000 kilomètres empruntés par la course en zone gendarmerie.

Un chiffre impressionnant qui illustre parfaitement la réussite et la plus-value de VIAPROTECT, dont le développement devrait se poursuivre. L’outil pourrait par ailleurs être utilisé prochainement, notamment à l’occasion du parcours de la flamme olympique des JO 2024.

Source: gendinfo.fr