Dans une communication aux commissions des affaires sociales de l’Assemblée nationale et du Sénat, la Cour des comptes souligne que la situation financière de la sécurité sociale, structurellement dégradée, appelle une « remise en ordre des comptes ».
Dans sa communication publiée en octobre 2024, la Cour des comptes alerte sur une trajectoire « non soutenable » des comptes sociaux, qui « fragilise la sécurité sociale.«
En effet, au-delà des efforts de maîtrise des déficits menés dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2025, la Cour met en garde contre « l’accumulation d’un stock structurel de dette sociale, sans solution pérenne de financement« , sur la période 2026-2028.
Un déficit de 18 milliards d’euros en 2024
Le déficit de la sécurité sociale (régimes obligatoires et fonds de solidarité vieillesse – FSV) s’élèverait selon le PLFSS pour 2025 à 18 milliards d’euros (Md€) en 2024, dépassant de 7,5 Md€ la prévision initiale en LFSS. La Cour pointe un effet de ciseaux entre :
- « recettes mal anticipées« , avec 6,2 Md€ de recettes en moins, notamment de cotisations sociales et de TVA ;
- et « dépenses mal maîtrisées » : 1,3 Md€ de dépassement, dont 1,2 relevant de l’ONDAM (objectif national de dépenses d’assurance maladie), essentiellement du fait de l’évolution des dépenses de soins de ville.
Le PLFSS pour 2025 prévoit un effort en recettes et en dépenses de 12,4 Md€ pour contenir le déficit et financer des mesures nouvelles, ce qui « représente de l’ordre du cinquième de l’effort global des 60 Md€ en 2025 sur les finances publiques proposé par le Gouvernement.«
Ainsi, la conjugaison d’une baisse de dépenses de 4,9 Md€ et d’une hausse des recettes de 7,6 Md€ ramènerait le déficit à 16 Md€, au lieu d’une prévision tendancielle de 28,4 Md€.
« Une trajectoire des déficits non soutenable de 2026 à 2028 »
Le PLFSS pour 2025 prévoit un déficit persistant de 19,9 Md€ en 2028, reflet d’une part croissante des dépenses de sécurité sociale par rapport au produit intérieur brut (PIB). Or, sur la période 2015-2025, la part des recettes de sécurité sociale par rapport au PIB « est en moyenne inférieure de 0,5 point de PIB à celle de ses charges.«
Cette situation appelle à rechercher des « marges d’efficience« , en particulier sur le système de santé, qui « porte et va continuer à porter la plus grande part des déficits à l’avenir« . Or, à rebours des mesures de rééquilibrage « vigoureuses » prises après la crise financière de 2008, la Cour pointe des économies « pas suffisantes pour infléchir à moyen terme le déficit structurel des régimes sociaux ».
La Cour des comptes parle d’un « point de bascule préoccupant » : le stock de dette anticipé s’élèverait en effet à 100 Md€ d’ici à 2028, soit quelque 3% du PIB. Or, depuis l’exercice 2024, les déficits de la sécurité sociale sont « sans solution de financement de long terme« , la capacité de reprise de dette de la Caisse d’amortissement de la dette sociale (CADES) étant épuisée. Une prolongation au-delà de 2033 de la durée de vie de la CADES « afin de financer le creusement des déficits sociaux » supposerait l’adoption d’une loi organique.
La Cour note cependant qu’un tel recours « ne remédierait pas » à la situation structurellement déficitaire des comptes sociaux, et appelle à l’adoption d’une stratégie pluriannuelle propre à concilier les objectifs de la sécurité sociale (qualité et sécurité des soins) et « ses contraintes de financement« , via un « examen détaillé des dépenses » et la recherche systématique d’une meilleure efficacité.
Source: vie-publique.fr