Avec 534 chiens répartis en métropole et outre-mer et 449 équipes cynophiles à former ou à recycler sur toute la France, un peu plus d’une centaine de chiens à acheter chaque année mais cinq fois plus à tester, le Centre national d’instruction cynophile de la gendarmerie (CNICG), basé à Gramat, tourne à plein régime toute l’année. Il nous ouvre les portes de son chenil et nous dévoile ses secrets de formation.
En gendarmerie, les chiens font, en moyenne, carrière durant 6 à 8 ans. L’équipe formée entre le maître et son chien constitue alors un véritable enjeu d’avenir opérationnel. Responsable de la sélection et de la formation, initiale et continue, le CNICG joue un rôle essentiel. Les dresseurs/instructeurs du centre, eux-mêmes anciens maîtres de chien expérimentés, en sont la clé. Ils doivent faire preuve de pédagogie, tant avec l’animal qu’auprès de l’homme, mais également de sensibilité professionnelle pour toujours « sentir » si le duo fonctionne.
Celui-ci sera amené à travailler dans l’un des trois grands domaines de la cynotechnie en gendarmerie : pistage, recherche de stupéfiants ou d’explosifs. Certaines technicités peuvent être associées comme celles des piste/avalanche, stupéfiants/défense ou « Sambi » : stupéfiants, armes, munitions, et billets de banque,…)
Cette polyvalence est rendue possible grâce aux compétences de certaines races, notamment le Malinois. Qualifié de véritable couteau suisse par les dresseurs, le Malinois peut exercer toutes les technicités, alors que le Springer sera plus spécialisé dans la recherche de matière. Le Saint-Hubert dispose, quant à lui, de l’odorat le plus développé parmi ses congénaires. Cette performance mêlée à son esprit chasseur le rend capable de séparer les odeurs et de travailler plusieurs jours après le passage de la personne recherchée. Il aime tellement la présence des humains qu’il est le seul au sein de l’Institution à être « recruté » dès ses deux mois et à vivre chez son maître, avec sa famille, plutôt qu’au chenil.
Flairer la bonne truffe
À partir de son 10e mois, le jeune chien peut être testé par un maître déjà en unité ou par un dresseur/instructeur du centre. Les qualités recherchées chez lui détermineront son avenir professionnel au sein de l’Institution. Pour être sélectionné, il doit se montrer sociable, équilibré mais surtout fanatique au jeu. En effet, le dressage étant basé sur la récompense, le chien doit absolument vouloir retrouver son jouet et être félicité lorsqu’il le récupère.
Si le chien est retenu, trois mois de « débourrage » s’ensuivent au CNICG poursuivies de 14 semaines de formation initiale avec le futur maître. Ce parcours rythme l’année de travail du dresseur/instructeur, comme Jérôme Devez, ouvrier d’état. « Chacun de nous connaît parfaitement son cheptel composé de sept chiens : six pour les stagiaires et un en secours, au cas où. Cette étape du « débourrage » est la plus importante puisque nous apprenons à connaître les chiens en nous appuyant sur leurs qualités naturelles et les amenons au niveau de mi-stage. »
Le métier de dresseur/instructeur nécessite fermeté, pédagogie et expérience. Cette dernière se transmet essentiellement à l’oral, au fil des stages et de l’arrivée au centre d’anciens maîtres de chien souhaitant partager leur savoir. « L’avenir de la cynotechnie en gendarmerie réside dans cette transmission, dans ce partage des retours d’expérience. Dédier un passage de sa carrière à la formation fait en quelque sorte partie du métier », déclare l’adjoint au chef du CNICG, le lieutenant-colonel Paul Betaille.
Maîtres et chiens s’apprivoisent
Parce qu’un chien ne travaillera pas seul, en parallèle, le candidat maître est également testé sur sa motivation et ses aptitudes, d’abord au sein de sa région d’origine, puis à Gramat. Après un test psychologique, un entretien de motivation et une course de 8 kilomètres en treillis/rangers, le dossier du militaire sélectionné passe entre les mains de la cellule évaluation/contrôle du centre. L’enjeu est grand : réaliser le « mariage » le plus heureux entre le futur maître et son chien, selon la personnalité de chacun. Alors qu’aucun des deux ne s’est encore rencontré !
Que le maître soit novice ou expérimenté, la formation initiale dure 14 semaines au sein du CNICG. « Le chien va dicter le rythme de travail, explique Jérôme Devez. On commence par 15 jours de familiarisation entre le futur maître et son chien, pour créer une osmose entre eux. »
L’une des étapes importantes de ce début de formation est d’apprendre aux stagiaires à ne plus raisonner en humain mais à comprendre le langage de leur chien. C’est ce que les dresseurs appellent la « lecture du chien ». Puis, les aspects techniques sont développés :
« Chaque compétence est travaillée méthodiquement, une difficulté à la fois, pour que l’équipe soit opérationnelle dès sa sortie du centre. Mais elle devra toujours s’entraîner, c’est essentiel ! »
Il faut compter trois ans de dressage pour faire évoluer le chien jusqu’à maturité. Un recyclage a lieu à la fin de la première année d’emploi pour perfectionner le niveau de ce tout jeune duo.
Rexpemo : une compétence rare
Expérimentée en 2014 et développée depuis 2016, la technicité Rexpemo (Recherche d’explosifs sur personnes en mouvement) constitue une compétence rare en France. La gendarmerie s’est lancée très tôt dans l’aventure.
Pour en découvrir un peu plus, rencontrez Néo, Woggle, Lali, M-Kayron, Mac et Lilou ainsi que leurs futurs maîtres. Ces duos récemment formés vont faire monter à 30 le nombre d’équipes cynophiles qualifiées Rexpemo de la gendarmerie nationale.