Préserver votre sommeil, soigner votre hypertension, contrôler régulièrement audition et vue, c’est primordial pour votre mémoire.

Oublier ses lunettes, chercher un prénom, se demander si la porte est bien fermée… Ces petits oublis font partie du quotidien, à 30 ans comme à 70. Mais à 70 ans, ils inquiètent souvent. « Personne ne court un 100 mètres à 70 ans aussi vite qu’à 20 ans, et personne ne consulte pour ça », compare avec malice le Pr Marie Sarazin, qui dirige l’unité de neurologie de la mémoire et du langage à l’hôpital Sainte-Anne, à Paris. Son message est rassurant: cessez de craindre Alzheimer à chaque oubli! La maladie touche 0,2% des 40-65 ans, 5% des plus de 65 ans, et bien que le chiffre augmente avec l’âge, 87% des plus de 75 ans ne seront jamais touchés. Mieux: la fréquence de la maladie diminue depuis une dizaine d’années. 

Pour retrouver de bonnes capacités de mémorisation et, de manière générale, un cerveau alerte, il faut miser sur les 100 milliards de neurones qui s’agitent dans nos méninges pour générer des millions de milliards de synapses, ces zones qui permettent le passage de l’influx nerveux. Plus cet organe est stimulé, plus il lui est facile de créer de nouvelles synapses. Autrement dit, le cerveau, ça s’entraîne!

Visuelle, auditive, épisodique ou sémantique, tous les types de mémoire passent par trois étapes. La première est l’encodage, l’enregistrement de l’information. Plus il est riche, plus le souvenir sera facile à restituer. C’est la fameuse madeleine de Proust. Seconde étape: le stockage. Le cerveau synthétise, enregistre et libère de la place. Cette phase est d’autant plus efficace qu’une information bénéficie de points d’ancrage dans le cerveau. Si je suis calé en cuisine, il me sera facile d’intégrer une nouvelle recette. Mais retenir le nom d’un joueur de basket si je ne connais pas ce sport sera plus ardu. La dernière étape est celle de la restitution. Celle qui nous fait enrager, avec ce mot « sur le bout de la langue »… Ne vous focalisez pas sur elle: quand les deux étapes précédentes sont correctement effectuées, le blocage ne dure pas.

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• Prendre soin de sa santé 

1) Préserver son sommeil

La nuit, le cerveau mémorise les informations. Si ce temps d’enregistrement est mis à mal, la mémoire flanche. « Éteindre les écrans deux heures avant de se coucher et créer des rituels favorise l’endormissement. Attention aux somnifères! Comme le manque de sommeil, ils peuvent altérer la mémoire », prévient le Dr Patrick Lemoine, auteur de « Dormez » (éd. Hachette, 2018). Ils doivent toujours être prescrits par un médecin pour une durée limitée, avec une évaluation des bénéfices et des risques. Autant que possible, misez sur les alternatives naturelles. La verveine, c’est sans modération! 

2) Soigner l’hypertension artérielle, le diabète et le cholestérol 

« La bonne santé du système cardio-vasculaire est l’élément le plus important pour prendre soin de sa mémoire », affirme le Pr Marie Sarazin. Le cerveau est très gourmand en oxygène. Il absorbe 20% de celui que nous respirons. L’efficacité du système cardio-vasculaire, qui permet notamment de le nourrir en oxygène, est donc fondamentale pour ses capacités de mémorisation. D’où l’intérêt d’un bon suivi médical et du respect du traitement prescrit. 

3) Contrôler son audition et sa vue 

Rien de tel que la communication pour garder une mémoire performante…Encore faut-il être en capacité physique d’échanger! D’après le neuropsychologue Francis Eustache, « la perte d’audition et l’isolement qu’elle entraîne sont un facteur identifié de déclin cognitif ». Préserver ses capacités sensorielles, c’est l’objectif des appareils auditifs bien réglés et des lunettes adaptées. 

4) Vérifier son ordonnance  avec son médecin

Certains médicaments peuvent altérer la mémoire. Avec sa vision globale de votre santé et de vos traitements, votre médecin généraliste est la première personne avec qui discuter de troubles de la mémoire. Il pourra modifier votre ordonnance en fonction de vos besoins. 

5) Être à l’affût en cas de baisse de moral 

Soyez indulgent avec vous-même. Si vous traversez une période de mal-être et que les troubles persistent, n’hésitez pas à consulter. La dépression altère la mémoire, mais le plus souvent, les troubles s’envolent quand le moral revient. « En revanche, il faut être attentif à une dépression qui survient sans cause identifiable, nuance le Dr Claire Boutoleau-Bretonnière, responsable neurologie au Centre mémoire du CHU de Nantes. Parfois, ce sont les pertes de mémoire qui engendrent un syndrome dépressif. « 

• Quand consulter? 

« Rien ne sert de rester avec des doutes anxiogènes. Dans les faits, si un ami a téléphoné dans la journée pour donner une information à transmettre à votre conjoint et que vous avez omis de la lui dire, pas d’inquiétude. Il a pu y avoir des interférences, cela arrive tout le temps. En revanche, si l’ami rappelle et que vous ne vous souvenez pas d’avoir eu l’information, cela signifie qu’elle n’a pas été encodée. Il faut comprendre pourquoi, donc consulter. Je conseille d’en parler à son médecin traitant, puis, éventuellement de consulter dans une unité spécialisée sur la mémoire à l’hôpital. Ces unités sont idéales car elles sont pluridisciplinaires. » 

– Francis Eustache, neuropsychologue, président du conseil scientifique de l’Observatoire B2V des mémoires, directeur Inserm de l’unité de recherche sur la mémoire humaine à Caen. 

Source: notretemps.com / Crédit photo: © D.R.