Les enquêteurs des sections de recherches de Strasbourg et de Metz ainsi que du groupement de gendarmerie départementale du Bas-Rhin, en coopération avec les autorités belges et israéliennes et les agences européennes Europol et Eurojust, ont mis fin aux agissements d’escrocs sévissant en France et en Belgique, au préjudice de particuliers, de sociétés et de collectivités, pour un montant estimé à 15 000 000 d’euros.
Depuis plus de deux ans, les militaires des Sections de recherches (S.R.) de Strasbourg et de Metz ainsi que du Groupement de gendarmerie départementale (GGD) du Bas-Rhin enquêtaient sur les agissements d’un groupe criminel organisé transnational, à l’origine d’escroqueries à vaste échelle, commises en France et en Belgique, au préjudice d’épargnants, de sociétés et de collectivités.
Les investigations, menées en lien avec les autorités de plusieurs pays, européens et extra-européens, et les agences Europol et Eurojust, ont porté leurs fruits. Plusieurs opérations judiciaires conduites en 2019, dont la dernière en décembre, ont ainsi permis de démanteler une organisation qui comptabilise 85 victimes physiques et plusieurs entreprises publiques et privées, pour un préjudice estimé à 15 000 000 d’euros.
2017 : l’enquête débute à Sélestat…
L’enquête débute en novembre 2017, quand la brigade de recherches de Sélestat initie des investigations sur une escroquerie portant sur de faux investissements en crypto-monnaies.
Sollicitée en appui, la Section de recherches (S.R.) de Strasbourg fait alors le rapprochement avec de nombreuses escroqueries similaires, au préjudice de plus de 50 victimes en France et à travers l’Union européenne (U.E.). Les enquêteurs identifient de multiples fausses sociétés et comptes de rebond à travers l’U.E.
Face à l’ampleur du phénomène et à la complexité de l’organisation criminelle transnationale révélée, la Juridiction interrégionale spécialisée (JIRS) de Nancy se saisit en juin 2018 et ouvre une information judiciaire pour escroqueries et blanchiment en bande organisée.
Les investigations des gendarmes se poursuivent dès lors dans le cadre d’une cellule d’enquête baptisée « Crypto-Trading 67 », associant les S.R. de Strasbourg et de Metz, ainsi que le groupement du Bas-Rhin.
Une structure criminelle organisée et rodée
Les enquêteurs mettent au jour une structure criminelle bien organisée, dont les diverses escroqueries alimentent des comptes bancaires frauduleux, dits de rebond, ouverts dans divers États de l’U.E., avant que l’argent ne soit rapidement transféré sur des comptes asiatiques.
Le mode opératoire est éprouvé : les escrocs mettent leurs victimes en confiance par différents subterfuges, leur faisant miroiter des plus-values rapides et des rendements juteux (de 5 à 35 %) sur des placements en bitcoins, en diamants, en or ou encore en vin. Ils leur proposent ensuite d’effectuer des investissements encore plus importants, dans le but de débloquer des bonus ou d’obtenir des rendements plus conséquents. Les victimes peuvent même suivre l’évolution de leurs investissements sur des sites Internets dédiés. Mais quand elles demandent à récupérer leurs fonds, elles n’obtiennent plus de réponses.
Des sociétés et des collectivités territoriales font également l’objet de tentatives d’escroqueries de type Faux ordres de virements (FOVI), via l’usurpation d’identités de fournisseurs et de victimes.
Un préjudice estimé à 15 000 000 millions d’euros
Le montant global des fonds escroqués est estimé à plus de 6 millions d’euros au préjudice d’une soixantaine de particuliers et au préjudice d’établissements publics et privés, ainsi que des tentatives d’escroqueries qui ont pu être bloquées à hauteur de 9 millions.
En janvier 2019, au regard de la dimension internationale du dossier, une Équipe commune d’enquête (ECE) est créée sous l’égide d’Eurojust, associant la France, la Belgique et Europol.
Les longues et minutieuses investigations permettent d’identifier plusieurs acteurs de cette organisation criminelle, l’architecture du réseau d’escroqueries, ainsi que le circuit de transfert et de blanchiment des fonds frauduleux. Les escrocs emploient par ailleurs des sites Internet et des lignes téléphoniques mises en place sous de fausses identités, ainsi qu’un « call center » en Israël utilisé pour les démarchages.
Les échanges avec les forces de sécurité israéliennes conduisent à la mise en place, en février 2019, d’une enquête miroir dans ce pays. Une Operational Task Force auprès d’Europol, réunissant les trois pays (Belgique, France et Israël), est parallèlement mise en œuvre, permettant ainsi aux enquêteurs de bénéficier de soutien en termes de déplacements et d’appuis techniques. C’est d’ailleurs la première fois que des enquêteurs français peuvent bénéficier de ce type de Task Force.
Interpellations dès janvier 2019
Le 20 janvier 2019, l’une des têtes présumées du réseau est interpellée avec trois complices sur le territoire national par les enquêteurs des S.R. de Strasbourg et de Metz. Trois des individus sont écroués et un placé sous contrôle judiciaire.
Des saisies mobilières et immobilières sont été également réalisées en France et au Luxembourg, pour un montant total dépassant le million d’euros.
L’existence de complices en Europe et en Israël oblige à une coopération internationale très étroite, tant policière que judiciaire, via des Commissions rogatoires internationales (CRI).
Décembre 2019 : opération judiciaire d’ampleur en Israël
Les 2 et 3 décembre derniers, une CRI permet ainsi de lancer une opération judiciaire d’ampleur en Israël, pilotée par les autorités locales, en présence des magistrats et des enquêteurs français et belges et avec l’appui opérationnel d’Europol.
Six personnes sont entendues, parmi lesquelles le principal donneur d’ordres présumé, escroc notoirement connu et déjà condamné par la justice française dans le cadre de la taxe à la fraude carbone. Les perquisitions des différents locaux personnels et professionnels s’avèrent positives.
La coopération internationale au cœur de l’enquête
L’opération conduite en Israël a constitué une réussite majeure pour l’enquête, permettant à la fois des avancées notables dans la compréhension du fonctionnement de ce groupe criminel et la démonstration d’une coopération réussie entre les forces de l’ordre de plusieurs pays, appuyées par les agences européennes Europol et Eurojust.
Parallèlement, de nombreuses Décisions d’enquête européennes ont également été exécutées au sein de l’Union européenne (Bulgarie, Espagne, Hongrie, Portugal, République Tchèque et Royaume Uni) afin d’identifier les sociétés titulaires des comptes rebonds et les individus à leur tête.
Plus largement, la réussite de cette enquête, marquée par une importante coopération entre les autorités de plusieurs États et les différentes agences européennes, montre une forte volonté internationale de démanteler ce type de groupe criminel organisé transnational.