Le Salon international de l’agriculture ouvrira ses portes samedi 22 février, à Paris, porte de Versailles, jusqu’au 1er mars. À cette occasion, des référents sûreté, venus de différents départements, et des gendarmes spécialisés en intelligence économique iront à la rencontre des exploitants agricoles, afin de les conseiller en matière de lutte contre les cambriolages, les vols de carburant, de métaux et de matériels agricoles, ainsi qu’en matière de protection de leur patrimoine immatériel.
La gendarmerie sera cette année encore présente sur le Salon de l’agriculture, du 22 février au 1er mars inclus, renouvelant le dispositif itinérant inauguré l’an dernier.
Trois binômes de référents sûreté venus de toute la France, ainsi que deux personnels de la direction générale, spécialisés dans les domaines de la sécurité économique et de la protection des entreprises, iront, durant toute la semaine, au contact des exploitants présents sur le salon, afin de diffuser des conseils de prévention et de vigilance contre les actes de malveillance dont ils peuvent être la cible.
Prévention de la délinquance traditionnelle
Les exploitations agricoles, souvent isolées et en milieu ouvert, sont en effet régulièrement victimes de vols touchant leur cheptel, leurs engins agricoles, les produits phytosanitaires ou encore le carburant. Des méfaits pouvant occasionner de lourds préjudices.
Il était donc logique pour la gendarmerie de mettre à profit le salon de l’agriculture pour prolonger son action quotidienne de prévention au côté des agriculteurs.
Pour l’adjudant Benoît Croguennec, Référent sûreté (R.S.) de la Cellule prévention technique de la malveillance d’Ille-et-Vilaine, présent sur le salon pour la deuxième année, et ses cinq camarades, il s’agira « d’aller de stand en stand, au contact des agriculteurs et des exploitants présents, comme nous le faisons au quotidien dans notre département. À la seule différence que, ne connaissant pas leur exploitation, nous nous en tiendrons à des conseils généralistes et pratiques, que l’on retrouve dans le guide réflexe “sécuriser mon exploitation agricole”. »
En matière de prévention des vols, les R.S. font très souvent le parallèle avec la sécurisation des habitations, tout en ayant conscience que leurs conseils, notamment en ce qui concerne la fermeture des bâtiments, ne doivent pas venir entraver l’activité quotidienne de l’exploitation. « Il faut leur proposer des astuces. Par exemple, pour contrer les vols de gazole, on conseille de rendre l’accès aux citernes difficile ou de couper l’alimentation de la pompe », présente l’adjudant.
Des problématiques spécifiques à chaque territoire
Outre les problématiques communes, comme les vols de carburant et de matériels, les R.S se doivent d’adapter leur discours à chaque territoire et à ses particularités, en lien avec la nature des activités développées ou la localisation géographique. « Dans le département de l’Ille-et-Vilaine, par exemple, nous avons une spécificité opérationnelle liée à l’activité ostréicole et conchylicole. Nous nous attachons à sensibiliser les producteurs mais aussi à trouver des solutions plus techniques pour prévenir les vols d’huîtres et de moules dans les parcs, poursuit le référent sûreté. En complément des surveillances effectuées par les brigades locales, nous avons ainsi fait cartographier l’ensemble de la baie et fait sérigraphier les véhicules des exploitants en fonction de leurs parcelles, à l’instar de ce qui était déjà en place dans la Manche. »
L’ensemble des référents sûreté a en effet la possibilité d’échanger via Résogend, un forum interne dédié, et de partager les bonnes pratiques mises en œuvre ici et là.
Sensibilisation et diagnostic sûreté personnalisé
Le salon de l’agriculture est d’ailleurs l’occasion de mieux faire connaître ce réseau des référents sûreté aux exploitants présents et de leur transmettre les coordonnées de leur interlocuteur local. Dans chaque département, les R.S. sont en effet en mesure de se rendre dans les exploitations afin d’effectuer un diagnostic personnalisé et ainsi de dispenser des conseils ciblés.
Depuis quatre ans, le Groupement de gendarmerie départementale de l’Ille-et-Vilaine (GGD 35) organise également, le temps d’une après-midi, sur une exploitation donnée, des travaux pratiques en groupe sur la base du volontariat.
Les R.S. animent également, tout au long de l’année, des sessions de sensibilisation, par exemple à l’occasion des assemblées générales de fédérations et de confédérations.
« Dans notre département, nous intervenons lors des assemblées cantonales de la FDSEA et des jeunes agriculteurs, ce qui nous permet, canton par canton, de couvrir l’ensemble de notre territoire, pour faire de la prévention de la malveillance et proposer des solutions, explique l’adjudant Croguennec. Tous les R.S d’Ille-et-Vilaine participent également au Salon international des productions animales (SPACE) de Rennes. C’est l’occasion de développer des liens avec des coopératives et des groupements d’éleveurs afin de compléter notre offre de diffusion d’alerte. Nous cherchons notamment à toucher les exploitants non syndiqués ou appartenant à d’autres syndicats que la FDSEA et les J.A., avec lesquels nous avons mis en place un réseau d’alerte par mail permettant de les informer de l’émergence de phénomène. Aujourd’hui, nous touchons près de 70 % des exploitants ; l’objectif est de tendre vers du 100 %. »
Des agriculteurs vigilants aux côtés des gendarmes
Cibles potentielles d’une délinquance économique et cyber
De plus en plus numérisées et détentrices d’une masse de données à valeur ajoutée, les exploitations agricoles, à l’instar de n’importe quelle entreprise, se doivent également d’être sensibilisées à la protection de leurs systèmes informatiques et de leurs données.
C’est ce que feront, tout au long du salon, la chef d’escadron Aurélie Dey et le gendarme Stéphane Mortier, de la section anticipation opérationnelle chargée de la Sécurité économique et protection des entreprises (Secope) au sein de la direction générale de la gendarmerie.
« Il est important de faire prendre conscience aux exploitants agricoles de la valeur des informations qu’ils possèdent, de la convoitise que cela peut engendrer et de leur vulnérabilité. Nous nous attachons à la protection de l’information dans sa globalité, y compris en matière de propriété intellectuelle (AOP, AOC, IGP…). Par ailleurs, certaines exploitations sont énormément numérisées et présentent de ce fait des risques en matière de piratage et d’intrusion dans leurs systèmes informatiques. Aujourd’hui, les exploitants agricoles constituent tous autant qu’ils sont des cibles potentielles, que ce soit dans le domaine financier, réputationnel ou en matière de cybersécurité, explique le GND Mortier. Sur le salon, nous dispensons un certain nombre de conseils pratiques au regard de tous ces risques, notamment à travers notre Jeu de 8 familles d’atteintes à la sécurité économique, qui s’adapte à tous les secteurs d’activité, même s’il est évident que les exploitants agricoles sont plus susceptibles d’être victimes d’un certain type d’atteintes. »
Cette opération ponctuelle vient en complément des actions menées tout au long de l’année, au niveau central comme au niveau local.
« Sur le salon, nous nous attachons davantage à entrer en contact avec les réseaux dans lesquels les exploitants s’inscrivent, comme les coopératives, les fédérations et confédérations, ainsi que les entreprises en lien direct ou indirect avec le monde agricole, afin de les sensibiliser sur le risque cyber et plus largement sur tout ce qui touche à la protection dans le domaine de l’information. À travers ces organismes, nous espérons diffuser nos messages de prévention en local, en complément de l’action des référents régionaux de la Secope, avance la CEN Dey. Nous profitons aussi de ce rendez-vous pour entretenir les relations avec nos interlocuteurs réguliers et nouer de nouveaux contacts avec les grands acteurs du monde agricole afin de monter d’autres opérations de sensibilisation et toucher le maximum de personnes. »
Le salon de l’agriculture est également un moyen pour les gendarmes de se tenir au courant des dernières évolutions et innovations touchant le monde agricole et qui pourraient constituer un risque. « Tout ce qui touche au numérique nous intéresse », insiste le GND Mortier. Et de citer le projet de « ferme digitale », tendant vers une quasi-automatisation des process : « Non seulement la numérisation d’une exploitation la rend plus vulnérable aux actes de cybermalveillance, mais typiquement, ce type de start-up innovante, susceptible de créer une richesse, peut vite devenir une proie de choix. Il est donc nécessaire de les sensibiliser à la protection de l’information et pour cela nous devons les connaître. »
Lutter contre le phénomène d’agribashing
Par ailleurs, certains agriculteurs étant également victimes d’actions d’intimidation, voire de violence, de la part de groupuscules radicaux (phénomène d’« agribashing »), la gendarmerie a créé, en octobre 2019, une cellule nationale de renseignement et d’enquête sur les atteintes au monde agricole. Baptisée « Déméter », du nom de la déesse grecque de la terre, cette unité a pour mission de recueillir du renseignement et de réaliser des rapprochements judiciaires afin d’identifier et de poursuivre les auteurs d’atteintes à la filière agricole, d’approfondir la connaissance des groupuscules extrémistes à l’origine de ces méfaits et de cibler leurs actions et, enfin, de proposer des actions coordonnées.
Source: gendinfo.fr / Crédits photos: © D.R.