L’adjudant Alain, de l’escadron de gendarmerie mobile 21/3 de Mont-Saint-Aignan, a été employé au Burkina Faso par le Commandement de la gendarmerie pour les missions extérieures, dans le cadre du projet européen de formation GAR-SI. Retour sur une expérience enrichissante professionnellement et humainement.
Initié en 2017, le projet européen GAR-SI (Groupe d’Actions Rapides – Surveillance et Intervention) a pour but de former des unités spécialisées dans cinq pays du Sahel (Mauritanie, Mali, Niger, Tchad et Burkina Faso), ainsi qu’au Sénégal, et de les doter en matériels, afin qu’ils puissent, à terme, faire face aux défis que rencontre leur pays d’origine en matière de sécurité.
Plus de 1 700 militaires ont ainsi été formés dans ces six pays. Des unités polyvalentes et autonomes ont été créées, dédiées au contrôle des flux et à la lutte contre le crime organisé et le terrorisme. Elles obtiennent des résultats opérationnels concrets dans un environnement sécuritaire dégradé.
Ces unités sont positionnées dans des lieux stratégiques, afin de lutter contre les groupes terroristes présents sur ces territoires. Elles permettent d’élargir le maillage des forces présentes dans les zones reculées et transfrontalières, d’assurer la sécurité des habitants alentours, et de collecter des renseignements afin de mener des actions contre l’ennemi.
Pour ces formations, le Commandement de la gendarmerie pour les missions extérieures (CGMEX) envoie régulièrement des gendarmes mobiles en mission courte sur le théâtre, comme l’adjudant Alain, de l’escadron 21/3 de Mont-Saint-Aignan. « C’est ma quatrième mission à l’étranger, précise-t-il. Après un détachement comme garde de sécurité à l’ambassade de France au Burkina Faso, une formation au maintien de l’ordre auprès de la gendarmerie jordanienne, une première formation GAR-SI au Sénégal, j’ai donc remis à nouveau le treillis pour cette mission GAR-SI au Burkina Faso. »
Les gendarmes qui arment ces unités sont sélectionnés par la gendarmerie bénéficiaire et suivent une formation spécifique de deux mois, assurée de concert par leurs cadres et par une équipe d’experts européens. « J’ai intégré une équipe composée de quatre Espagnols, deux Italiens, deux Portugais et deux Français. Nous étions commandés par un lieutenant de la Guardia civil et appuyés par deux colonels coordinateurs, un Français secondé d’un Portugais. »
L’objectif, lors de cette phase du projet GAR-SI, était de former 55 stagiaires destinés à renforcer l’unité de Barani, déjà existante, et 102 autres qui constitueront l’effectif de l’unité de Mangodara qui, elle, est en création.
« Le premier jour du stage ressemble à un déclenchement de chronomètre, raconte l’adjudant Alain. C’est l’ébullition ! La direction du stage peaufine les derniers réglages, et nous faisons la connaissance des cadres avec lesquels nous travaillerons. On devine une forme d’excitation de la part des stagiaires. Ils sont sur-motivés ! Nous sentons qu’ils attendent beaucoup de cette formation. »
Le stage commence par des évaluations physiques (3 000 mètres, tractions, pompes, abdominaux) et un parcours collectif d’engagement. En ce mois de mai, la saison sèche touche à sa fin, et le thermomètre affiche plus de 45 degrés. « Nous sommes impressionnés par la résistance des stagiaires à la chaleur et leurs performances très honorables », note le gendarme.
Les cours débutent ensuite : armement, Technique d’intervention opérationnelle rapprochée (TIOR), escorte de convoi, tactique d’intervention, combat, topographie, etc. Du fait des différences d’ancienneté et d’expérience des participants, toutes les matières sont revues par la base. « Le timing étant serré, nous adoptons une pédagogie vulgairement nommée « marteau thérapie », indique Alain. Ce mode opératoire repose sur la répétition des paroles, des gestes, des manipulations, afin de stimuler les mémoires auditives, gestuelles et visuelles. Grâce à cela, nous avons pu avancer à une bonne cadence, en nous contentant, à chaque début de cours, d’un bref rappel sur la séance précédente. »
La plus grande importance est accordée au module de tir. Les gendarmes du GAR-SI sont dotés de pistolets semi-automatiques Taurus, de fusils d’assaut AK 47 (Kalachnikov) et d’armes d’appui PKMS. « Il est impératif qu’à la fin du stage ils soient efficaces avec l’ensemble de leurs armes de dotation. Or, les carences techniques constatées lors des premières séries nous confirment que, dans ce domaine, la marge de progression est importante. Alors nous passons beaucoup de temps au champ de tir, avec pour seule limite la dotation en munitions. Il faut avoir à l’esprit que la probabilité qu’ils vivent un échange de tirs avec l’ennemi est très élevée, donc il faut être prêt. »
Parallèlement, des embuscades, des ratissages, des exercices de réaction face à une attaque sont mis en pratique. Le secours au combat, le combat à moto, la tactique d’intervention pour les préparer ensuite aux techniques « SWAT » sont également enseignés.
« Nous sommes au pays « des hommes intègres », relate l’adjudant. De par leur éducation, les Burkinabés sont des personnes droites, accueillantes, serviables et agréables à fréquenter. Le contact est très facile, on peut rire et plaisanter assez rapidement. Nos stagiaires sont des militaires de la gendarmerie, comme nous, et se montrent très respectueux des statuts et des grades. Après quelques semaines, les relations se simplifient, sans pour autant sacrifier à la discipline. C’est dans ce formidable état d’esprit que nous avons avancé ensemble pour chercher à les perfectionner dans tous les domaines de la formation. »
Pour Alain, comme pour les autres militaires européens, cette mission constituait aussi un temps d’échange, source d’enrichissement personnel, comme cette visite à l’école de Ziniaré. « Nous sommes arrivés les bras chargés de fournitures scolaires achetées à Ouagadougou pendant le week-end, raconte-t-il. L’accueil reçu et la reconnaissance sincère des enseignants et des enfants sont inoubliables. Je suis venu pour donner mon énergie, mon temps, transmettre mes connaissances, partager mes astuces tactiques et techniques. Mais je ne repars pas sans rien : mes camarades africains m’ont offert leur joie de vivre, leurs sourires permanents… Ils sont capables de créer des moments de complicité totalement inattendus, comme ces chants traditionnels entonnés lorsqu’on leur accorde une pause au milieu d’un cours. »
Source: gendinfo.fr