Le 23 août 2022, les gendarmes des Vosges ont interpellé l’auteur du vol d’un buste d’Héraclès, entreposé au sein des thermes de Plombières-les-Bains et évalué à près de 30 000 euros. Une enquête qui témoigne, à nouveau, du business généré par le trafic d’objets d’art.

Avec son patrimoine thermal unique, multimillénial même, la commune de Plombières-les-Bains est un incontournable des stations françaises. Napoléon III, Montaigne, Musset ou encore Berlioz s’y sont succédé afin de soigner leurs maux. Le cadre architectural de ses thermes, associant vestiges romains et style impérial, en fait d’ailleurs un établissement protégé au titre des Monuments Historiques. Un véritable havre de paix donc… et pourtant ! Le 9 août 2022, la direction des thermes de la commune s’aperçoit de la disparition d’un buste du XIXe siècle, prêté depuis 1934 par le Musée du Louvre. Copie d’une œuvre d’art représentant Héraclès, il pèse près de 80 kg et est estimé à 30 000 euros.

À la recherche du voleur

Le Tribunal Judiciaire d’Épinal confie l’enquête à la Brigade de recherches (B.R.) de Remiremont.

En lien avec le Service central de renseignement criminel (SCRC) de la gendarmerie et l’Office central de lutte contre le trafic de biens culturels (OCBC), les gendarmes procèdent à une diffusion nationale et internationale afin de signaler le vol de l’objet d’art. Parallèlement, les enquêteurs procèdent à des investigations minutieuses. L’enquête de voisinage les oriente vers un véhicule utilitaire, immatriculé au Luxembourg. Celui-ci aurait été aperçu à proximité des thermes au moment des faits.

Une enquête concluante

Rapidement, les gendarmes de la B.R. de Remiremont identifient et localisent son utilisateur. Il s’agit d’un ressortissant luxembourgeois qui rénove une maison dans les Vosges. Le 23 août 2022, deux individus sont interpellés. Le premier est identifié comme auteur du vol. Le second, quant à lui, le logeur et beau-frère, est rapidement mis hors de cause.

La perquisition effectuée sans assentiment sur accord du juge de la liberté et de la détention permet de découvrir le buste dérobé, un peu endommagé, ainsi que 12 chaises, 2 lithographies et un plan sur support métallique, tous provenant également des thermes.

À noter : L’article 76 du Code de procédure pénale prévoit dans son premier alinéa que « les perquisitions, visites domiciliaires et saisies de pièces à conviction ou de biens dont la confiscation est prévue à l’article 131-21 du Code pénal ne peuvent être effectuées sans l’assentiment exprès de la personne chez laquelle l’opération a lieu ». En revanche, « si les nécessités de l’enquête relative à un crime ou à un délit puni d’une peine d’emprisonnement d’une durée égale ou supérieure à trois ans l’exigent ou si la recherche de biens dont la confiscation est prévue à l’article 131-21 du Code pénal le justifie, le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire peut, à la requête du procureur de la République, décider, par une décision écrite et motivée, que les opérations prévues au présent article seront effectuées sans l’assentiment de la personne chez qui elles ont lieu », comme mentionné à l’alinéa 4.

Pour ces faits, le mis en cause est alors convoqué devant le tribunal judiciaire d’Épinal, le 25 mai 2023.

Le trafic de biens culturels, une réalité

L’enquête décrite ci-dessus témoigne, une nouvelle fois, de l’intérêt que portent les malfaiteurs aux biens culturels. Et pour cause, ce commerce illicite est extrêmement lucratif. D’après l’UNESCO, il se hisserait même au troisième au rang des activités criminelles internationales, après les trafics de stupéfiants et d’armes. Une estimation approximative au vu de la faible remontée d’informations au niveau international.

Pour tenter d’endiguer le phénomène, 141 États se sont accordés sur la nécessité de mettre en place des mesures particulières visant à interdire et empêcher l’importation, l’exportation et le transfert de propriétés illicites des biens culturels, en ratifiant la Convention de l’UNESCO de 1970. Car si le trafic entraîne la perte de patrimoines inestimables, il est également susceptible d’alimenter le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme.

Ce fléau dépossède les peuples de leur histoire et de leur identité.

UNESCO

En France, le vol d’objets culturels fait l’objet d’une disposition spéciale, l’article 311-4-2 du Code pénal, et est puni de 7 ans d’emprisonnement et de 100 000 € d’amende. Mais les enquêtes sont souvent complexes, de par leur dimension internationale. Ainsi, pour appuyer les gendarmes territoriaux, généralement les premiers à être saisis de ces affaires, un Office central de lutte contre le trafic de biens culturels (OCBC) a été mis en place il y a près d’une cinquantaine d’années. Son champ d’action est vaste, autant que l’est la définition de « biens culturels ». Selon l’UNESCO, il s’agit en effet de tout bien qu’un pays considère comme ayant une valeur artistique, historique ou archéologique et qui appartient à son patrimoine culturel. Pillages archéologiquesvols dans les églises ou dans les musées… tout cela entre dans la compétence des gendarmes et des policiers qui composent l’OCBC. S’ils ne se saisissent pas directement de l’enquête, ils sont en mesure d’apporter une expertise aux enquêteurs qui en ont la charge, grâce à leur connaissance pointue du marché de l’art.

Source: gendinfo.fr