Agissant pour faire cesser des crises de haute intensité, la Force intervention (F.I.) dispose de capacités hautement techniques, faisant d’elle une unité unique en matière d’intervention.

Le 26 décembre 1994, la France entière découvrait les militaires du GIGN en action. Devant leur poste de télévision, des millions de téléspectateurs les observaient pénétrer dans un avion dans lequel se trouvaient quatre terroristes et plus d’une centaine d’otages. Ce type d’intervention est la raison pour laquelle le GIGN a été créé. Être capable d’intervenir en tout temps et en tout lieu, sur des crises de haute intensité, constitue la force de l’unité. D’abord, par la négociation, puis par la neutralisation, lorsque aucune autre issue n’est possible. Aujourd’hui, plus de 80 opérationnels composent la F.I. Recrutés selon des critères exigeants, ils sont les spécialistes du plus haut spectre de l’intervention.

Intervenir en tout temps…

La F.I. est en capacité constante de mobiliser des opérationnels, en un temps réduit. Chaque semaine, deux sections sur quatre sont d’alerte immédiate. « La première alerte est celle de «droit commun». Elle a une contrainte forte, car c’est celle qui assure en premier la mission de contre-terrorisme, de libération d’otages et de gestion des forcenés », explique le chef d’escadron (CEN) Cédric, chef de force. Celle-ci est composée en grande majorité de membres de la F.I., et complétée par des militaires spécialistes, tels qu’un dépiégeur d’assaut, un maître de chien, un militaire de la section des moyens spéciaux, un transmetteur, un magasinier, un médecin et un infirmier, appartenant à l’antenne médicale de Satory.

Lorsque l’alerte est déclenchée, toutes les capacités partent au côté de la F.I., afin que rien ne manque sur place et que l’intervention soit la plus rapide possible. « La seconde alerte, qui représente 80  % de notre activité, est l’alerte judiciaire. Dans ce cadre, la programmation dépend de la planification des opérations judiciaires des unités de gendarmerie, de police ou des douanes qui sollicitent notre appui », ajoute le chef de force.

Mais même lorsqu’ils ne sont pas d’alerte, les militaires sont mobilisables et peuvent renforcer les deux sections d’alerte. « On n’envoie jamais les deux sections d’alerte sur la même mission. S’il y a besoin de plus de militaires, on envoie en renfort ceux des autres sections, ou on monte une troisième alerte. » Car au sein de la F.I., « tout le monde est capable d’occuper tous les postes. » Les militaires disposent en effet d’un socle de formation commun et sont donc interchangeables. Quel que soit le grade, tous les opérationnels de la F.I. sont en mesure de remplir le rôle d’équipier et de participer à une colonne d’assaut sur l’ensemble du spectre missionnel du GIGN. C’est d’ailleurs ce qui fait la particularité de la F.I. par rapport aux autres unités spécialisées et qui lui permet de monter en puissance rapidement. En novembre  2021, par exemple, lors de la crise aux Antilles, il a fallu moins de 4 heures pour rassembler les opérationnels de la F.I. et embarquer dans l’avion, avec l’ensemble du matériel nécessaire à la réalisation de la mission.

… et en tout lieu

La F.I. est compétente pour intervenir dans tous les milieux. « Ceux-ci sont tous régis par un plan gouvernemental, au sein duquel le GIGN est pour une grande partie leader », indique le CEN Cédric. Il l’est tout d’abord en matière de contre-terrorisme aérien, où la F.I. est l’unité prioritaire pour intervenir. Concernant le contre-terrorisme maritime, en revanche, la F.I. partage la compétence de l’intervention avec la Marine nationale. Si les militaires de la force maîtrisent la phase d’assaut, la Marine nationale, elle, prend la main sur la reprise d’environnement. « Lors d’un assaut en mer, on se coordonne avec les commandos marine pour favoriser l’approche des hélicoptères et la dépose sur le bateau. Ensuite, il faut reprendre le navire pour se rapprocher des côtes afin de procéder aux opérations de secours. C’est la Marine qui réalise ces manœuvres. »

Les militaires de la F.I. peuvent également intervenir en milieu nucléaire, en atmosphère viciée (chimique, bactériologique, etc.), ou encore en milieu ferroviaire.

Ce qui permet à la force d’être opérationnelle sur l’ensemble de ces milieux est l’entraînement auquel elle s’astreint. « En matière de contre-terrorisme maritime, on réalise trois exercices dans l’année. Pour le milieu nucléaire, on participe régulièrement à des exercices nationaux, y compris dans les centrales. » Quant aux moyens de projection, la F.I. a le choix entre la voie aérienne (hélicoptères de la section aérienne de gendarmerie, dont le nouveau H160, et du groupe interarmées d’hélicoptères, ou avions de l’alerte gouvernementale) et la voie routière. Le moyen est toujours adapté à la mission.

Des missions de haute intensité

La F.I. est le dernier recours en matière d’intervention. Du contre-terrorisme à l’interpellation de dangereux criminels, en passant par la neutralisation d’un forcené ou de preneurs d’otages, les technicités et les compétences qu’elle détient lui permettent de réaliser des interventions en sécurité lors de crises de haute intensité, préservant ainsi le maximum de vies humaines. Pour son engagement, la force dispose d’une cellule d’évaluation des opérations, qui estime le niveau d’engagement des missions de police judiciaire et réoriente au besoin les demandes, notamment vers les Antennes GIGN (AGIGN).

En matière d’intervention spécialisée, c’est à un autre niveau que l’engagement se décide. « Le lien entre les antennes et la F.I. est ténu. L’AGIGN peut être engagée seule, à la place de la F.I., quand l’intensité de la mission relève de sa compétence. Elle peut aussi être primo-intervenante, le temps que nous arrivions sur les lieux. Quoi qu’il arrive, l’engagement de la F.I. relève du commandant du GIGN, voire du directeur des opérations et de l’emploi pour les missions de contre-terrorisme ou en dehors du territoire métropolitain », explique le CEN Cédric.

L’engagement de la F.I. fait l’objet d’une évaluation fine afin de pouvoir adapter au plus juste le volume de forces engagées. « Une section peut intervenir seule, sous les ordres de son chef. En revanche, dès lors que plusieurs sections sont mobilisées ou qu’il y a des otages, le chef de la F.I. est engagé afin de prendre la direction des opérations et conseiller l’autorité. » Les opérations les plus dimensionnées sont dirigées par le CEMOPS, voire le commandant du G.I.

Des capacités uniques

Au sein de la F.I., tous les militaires ont le même socle de formation. Sur cette base, ils se spécialisent par la suite. L’unité dispose ainsi de moyens capacitaires diversifiés, complémentaires entre eux. Cela en fait une force intégrée, complètement autonome. Tireurs d’élite longue distance, experts en effraction ou en négociation, ou encore technicien « montagne », toutes les spécialités sont présentes. Et elles ne sont pas choisies au hasard. « Il faut que les spécialités correspondent aux besoins avérés de l’unité  », indique le CEN Cédric. Il faut ensuite les entretenir. C’est pourquoi, chaque semaine, les spécialistes réalisent des entraînements ciblés.

En plus des spécialités techniques, chaque section dispose d’une spécialité de projection : les plongeurs d’intervention ou les chuteurs opérationnels. Elles augmentent les capacités d’action de la force, en permettant de projeter des hommes dans des conditions particulières ou en grande discrétion. Les chuteurs opérationnels peuvent ainsi réaliser des infiltrations sous voile, tandis que les plongeurs d’intervention ont la compétence pour aborder un navire à quai ou mouillé en pleine mer, pour sécuriser les lieux, neutraliser d’éventuelles sentinelles ou réaliser de l’acquisition technique du renseignement. « Ces capacités de projection entretiennent également le lien entre les armées et l’unité, à travers, par exemple, la formation parachutiste à l’École des troupes aéroportées (ETAP), ou les entraînements spécifiques des plongeurs avec les commandos marine. »

S’entraîner comme on agit

L’entraînement est au cœur de l’activité de la F.I., les capacités et les technicités sont en permanence entretenues, de manière individuelle ou collective. Régulièrement, des exercices sont organisés, avec les moyens qui seront réellement employés le jour  J. Engager plusieurs hélicoptères sur un entraînement n’est, par exemple, pas exceptionnel. Cela peut aussi bien être le cas sur un exercice d’interception de véhicule que sur celui d’une prise d’otages dans un bâtiment en hauteur.

Lors de ces exercices, toutes les phases sont jouées, de l’alerte jusqu’à l’interpellation ou la neutralisation des malfaiteurs. Ces manœuvres fictives en conditions réelles sont indispensables et permettent d’être totalement opérationnels en situation. Les lieux utilisés sont variés et régulièrement renouvelés, afin que les gendarmes ne s’habituent pas à progresser dans un seul environnement. L’anticipation est également au cœur des réflexions stratégiques menées par le GIGN pour adapter son entraînement. « L’état-major opérationnel propose des thématiques à l’année, qui engagent toute l’unité. En 2020, nous nous sommes entraînés sur les traques, et en 2021, sur les affrontements armés urbains », souligne le CEN Cédric. Des préparations rapidement mises en application. D’une part, lors des traques dans les Cévennes, puis en Dordogne, en mai 2021. D’autre part, à l’occasion de la crise aux Antilles, en novembre et décembre 2021, où la F.I. a participé aux opérations de rétablissement de l’ordre et de lutte contre les violences urbaines.

Cette volonté s’inscrit dans l’esprit du GIGN 3.0 : répondre aux besoins de la gendarmerie, actuels et à venir. Les capacités de l’unité ne se limitent plus aujourd’hui au contre-terrorisme. Le but est d’agir en complémentarité et en cohérence avec les autres unités de gendarmerie. Cela passe par l’adaptation au cadre de l’action, mais également par l’interopérabilité avec les autres unités et forces de sécurité.

Source: gendinfo.fr