Créée en février 2020, la Cellule de protection des familles (CPF) de Vannes est composée de sept militaires qui prennent en charge et accompagnent les victimes de VIF et de faits à caractère sexuel. En 2021, 443 victimes ont été auditionnées, dont 337 mineurs. En effet, les enquêteurs de cette unité sont spécialisés dans le recueil de la parole des enfants victimes. Néanmoins, exprimer l’indicible, être confronté à nouveau aux faits lors de l’audition, au processus judiciaire et à la vue de l’uniforme peut être perturbant et bloquer la parole. Certaines victimes n’arrivent pas à surmonter les traumatismes liés aux épreuves endurées. C’est au regard de ce constat que l’adjudante Muriel a proposé d’accueillir un chien d’assistance judiciaire.
Des chiens spécialement formés
Pour concrétiser ce projet, un partenariat a été signé avec l’association Handi’chiens. Créée en 1989 et reconnue d’utilité publique, elle assure l’acquisition, puis l’éducation, durant deux ans, de chiens spécialisés qui seront mis à disposition de différents bénéficiaires : chien d’assistance pour les personnes en situation de handicap, chien d’éveil pour les enfants autistes et trisomiques, chien d’accompagnement pour les personnes âgées, chien d’assistance judiciaire, etc. Sélectionné dans un élevage de chiens de race, l’animal est remis à une famille d’accueil à l’âge de deux mois, afin de le sociabiliser et de le pré-éduquer. Dès ses 18 mois, il est formé par des éducateurs dans l’un des quatre centres de l’association, avant d’être remis aux futurs bénéficiaires six mois plus tard. Depuis sa création, Handi’chiens a ainsi formé et remis plus de 2 700 chiens.
Le 19 novembre dernier, c’est avec un mélange de joie et d’ émotion que l’adjudante Muriel s’est vu remettre Rumba, une chienne golden retriever fauve âgée de deux ans, au centre de l’association Handi’chiens de Kunheim, en Alsace (68). Rumba n’est pas une chienne comme les autres. Affectueuse et sociable, elle fait preuve d’une grande empathie et s’avère particulièrement douce avec les enfants. Incarnant la tendresse et la sérénité, elle est très protectrice et adore se blottir auprès des petits comme des grands. Sa présence avant, pendant et après les auditions doit ainsi permettre de rassurer et de faciliter le témoignage des enfants, en favorisant la construction d’une relation de confiance entre l’enquêteur et la victime, en diminuant les symptômes somatiques et physiologiques du stress et de l’anxiété, en instaurant un climat de confiance nécessaire à la libération de la parole, en apportant un soutien émotionnel et en stimulant l’attention de l’enfant. Il s’agit d’aider les victimes et les témoins les plus vulnérables à s’exprimer, en atténuant le caractère parfois traumatique du processus judiciaire.
Un investissement collectif
Si l’association Handi’chiens finance en grande partie le projet, la cellule de protection des familles de Vannes a dû trouver d’autres partenaires pour contribuer à la prise en charge des frais d’acquisition, de formation du chien et de sa référente, d’entretien, de soins vétérinaires, d’alimentation et d’assurance. Ont ainsi participé au financement de cette démarche innovante, la préfecture du Morbihan, les associations France Victimes 56, Alexis Danan de Bretagne et la Voix de l’Enfant, le centre hospitalier Brocéliande Atlantique, la société Diana Pet Food et plusieurs animaleries locales.
L’adjudante s’est également beaucoup impliquée et investie dans ce projet. Après avoir convaincu sa hiérarchie et participé activement à la recherche des partenaires, elle a suivi une formation d’une dizaine de jours en Alsace pour accueillir Rumba et devenir officiellement sa référente. En cette qualité, elle doit assurer personnellement et quotidiennement sa garde et son suivi, ce qui signifie que la chienne vit à son domicile. C’est donc un projet à la fois professionnel et familial.
Quand Rumba tend l’oreille
Depuis le 9 décembre 2022, Rumba a déjà participé à douze auditions, dont sept avec des mineurs, toute victime pouvant bénéficier de sa présence. Effectuées à la CPF et à l’accueil pédiatrique médico-judiciaire du Centre hospitalier Bretagne Atlantique à Vannes, ces auditions ont produit des résultats plus qu’encourageants. Assise ou couchée, Rumba reste parfaitement calme, à proximité de la victime, pour la rassurer et l’accompagner dans le recueil de son témoignage.
D’autres chiens d’assistance judiciaire devraient rejoindre des unités de la gendarmerie dans les prochains mois. Le garde des Sceaux, Éric Dupond-Moretti, a d’ailleurs annoncé, le 20 décembre dernier, la généralisation des chiens d’assistance judiciaire dans tous les départements, afin d’accompagner les victimes mineures lors des procédures, du recueil de la plainte jusqu’au tribunal.
Source: gendinfo.fr