Alors que se termine le Sommet international de la Francophonie, qui s’est tenu les 4 et 5 octobre 2024, à Villers-Cotterêts, dans l’Aisne, puis à Paris, retour sur l’implication de la gendarmerie dans différents dispositifs participant à la promotion de la francophonie.

Dans la continuité de son engagement sur le territoire national, la gendarmerie inscrit également son action vers l’espace européen et extra-européen, afin de contrer à la source les menaces pesant sur la sécurité intérieure du pays, comme le terrorisme, la criminalité organisée, la cybercriminalité ou encore l’immigration irrégulière.

Cet engagement à l’international se décline notamment au travers de nombreuses actions de coopération menées avec des pays amis, qui participent au rayonnement de la France et à la promotion de la francophonie. Tour d’horizon.

Des formations pour les officiers et sous-officiers de pays amis

L’Académie militaire de la gendarmerie nationale (AMGN) ouvre chaque année ses formations aux partenaires étrangers, dans le cadre de la formation initiale, pour les officiers de carrière et les sous-officiers destinés à intégrer le corps des officiers, de Forces de sécurité intérieure (FSI) à statut militaire, mais aussi dans le cadre de la formation continue des Officiers des pays amis (OPA) de la France, qui ne sont pas obligatoirement passés par la formation initiale : stage de l’Enseignement militaire supérieur du 1er degré (EMS 1), formation du Centre supérieur d’enseignement militaire de la gendarmerie (CSEMG) et Enseignement supérieur du 2e degré (ES 2). Si ces formations peuvent concerner des stagiaires originaires de tous les continents, ceux-ci viennent majoritairement de pays francophones d’Afrique.

Par ailleurs, le MB Management de la sécurité, créé en 2014, destiné aux cadres supérieurs expérimentés, dirigeants d’entreprise et d’organisme public, est ouvert aux auditeurs étrangers. Cette formation en temps partiel, qui se déroule en quatorze semaines, est conçue pour acquérir des connaissances complémentaires dans les domaines de la sûreté, de la sécurité, du cyber et du management.

Les formations initiales des sous-officiers en langue française du CEGN (Commandement des écoles de la gendarmerie nationale) sont également ouvertes aux partenaires étrangers.

Initié par la gendarmerie nationale, le projet POLARIS (pour POLice Academies Regional Integrated Schooling) a été identifié par l’Union européenne (U.E.) comme un nouveau modèle de formation, apte à promouvoir une culture européenne commune parmi les jeunes recrues des FSI des États membres.

Depuis 2017, plusieurs promotions d’élèves-gendarmes français et d’élèves-gardes espagnols ont ainsi été jumelées, alternativement à l’école de Valdemoro (ES) et à l’École de gendarmerie de Dijon. Jusqu’en 2022, les enseignements étaient réalisés dans les deux langues et permettaient d’élever tant le niveau technique que les compétences linguistiques des deux contingents.

Le projet FIEP G4 – « Polaris » découle d’une impulsion donnée par les quatre directeurs généraux des forces de type gendarmerie française, italienne, espagnole et portugaise. Il s’agit d’un module d’enseignement et d’aguerrissement conjoint entre des élèves en formation initiale issus de ces quatre forces. Organisé à tour de rôle par les pays participants, ce module visant à développer une culture européenne commune des FSI est réalisé dans la langue du pays d’accueil. En mai 2024, l’école de gendarmerie de Montluçon accueillait la seconde session de ce dispositif.

Enfin, le stage transfrontalier Polaris / Erasmus +, organisé par la Région de gendarmerie Grand Est (RGGE) en 2024, destiné à des gendarmes français et à des policiers allemands du Land de Bade-Wurtemberg nouvellement affectés dans des unités frontalières et possédant des compétences linguistiques dans la langue du pays partenaire, vise à sensibiliser ses participants aux spécificités de leur nouveau contexte professionnel transfrontalier (cadre juridique, organisation des FSI partenaires et acteurs de la coopération policière transfrontalière).

Le Centre national de formation aux langues et à l’international (CNFLIG)

Rattaché en 2018 au Centre national de formation aux langues et à l’international de la gendarmerie (CNFLIG), le Cours international de français de Rochefort (CIFR) a pour principale mission de former à la langue française des officiers et des sous-officiers étrangers des armées, de la gendarmerie et de la police, grâce à une formation associant grammaire et phonétique, connaissance des institutions et des civilisations ainsi que la terminologie professionnelle. Des visites pédagogiques et culturelles dans les principales villes de la région complètent le programme. Les formations durent entre deux semaines et six mois.

Dans le cadre d’accords bilatéraux avec des pays alliés et amis, la Direction de la coopération de sécurité et de défense (DCSD) se charge de sélectionner les stagiaires aux stages de perfectionnement en langue française.

Le CIFR accueille annuellement une moyenne de cent stagiaires. Il s’agit essentiellement de formateurs de français servant dans les écoles militaires ou de gendarmerie et de police, de militaires étrangers appelés à suivre des cursus au sein des forces françaises, ou susceptibles d’être envoyés en mission dans des pays francophones. En 43 ans d’activité, près de 7 000 stagiaires issus de 143 nationalités non francophones ont été formés.

Dans le cadre de la formation en langue italienne à vocation professionnelle, le département d’italien du CNFLIG organise également des échanges linguistiques entre la gendarmerie et l’arme de Carabiniers. Pour l’année 2023, les stages de coopération linguistique franco-italiens, dénommés CLIF (Corso Linguistico Italiano Francese) et CLIFA (Corso Linguistico Italiano Francese Avanzato), d’une durée de deux semaines chacun, se sont déroulés au mois de septembre 2024 à Turin et en octobre 2024 à Rochefort. Cinq carabiniers et cinq gendarmes ont bénéficié d’un parcours immersif, où le travail en binômes a été privilégié pour favoriser l’acquisition de la terminologie juridique et policière et développer une bonne compréhension des techniques de travail et des procédures en vigueur.

Des partenariats avec les centres de formation situés à l’étranger

Italie

La gendarmerie contribue à hauteur de deux officiers aux équipes de formateurs du CoESPU (Center of Excellence for Stability Police Units), situé à Vicenza, en Italie, œuvrant au profit des forces déployées dans les opérations de maintien de la paix de l’ONU.

En septembre 2024, un premier stage en français y a été organisé. Adressée à un contingent sénégalais susceptible d’être déployé en Haïti, cette session comprenait un cours d’une semaine de préparation au déploiement ONU, suivi de trois semaines de cours d’état-major spécifiques aux FPUs (Formed Police Units).

À terme, l’objectif est de pouvoir proposer deux séquences de cours de l’ONU en français dans l’année, car les missions actuelles se situent principalement dans des zones francophones. De plus, les pays contributeurs de forces proviennent souvent d’Afrique francophone.

À noter

Les officiers de gendarmerie affectés au CoESPU ou au CGMEX (Commandement de la Gendarmerie pour les Missions Extérieures), et certifiés instructeurs ONU, contribuent à l’encadrement du stage de formation des formateurs en langue française organisé chaque année par la DCSD, en lien avec le ministère des Armées, à l’École Militaire.

 Allemagne

Le Centre de formation linguistique commun (CFLC) de Lahr, inséré dans un centre de formation initiale de la police du Land du Bade-Wurtemberg, propose des modules qui combinent formation professionnelle, enseignement linguistique et découverte de la culture. Gendarmes français et policiers du Bade-Wurtemberg s’y retrouvent pour perfectionner leurs compétences linguistiques et professionnelles. L’enseignement y est assuré par deux militaires de la gendarmerie et par deux policiers du Bade-Wurtemberg. Les modules de formation peuvent recourir au dispositif des « tandems », dans lequel des binômes franco-allemands réalisent des immersions au sein d’unités opérationnelles frontalières.

À Kehl, des cycles de séminaires binationaux et bilangues sur la coopération policière transfrontalière, proposés par l’EuroInstitut, constituent des vecteurs de la francophonie dans la mesure où les effectifs des différentes administrations, notamment des FSI et de la justice, sont amenés à travailler ensemble dans les deux langues.

L’École de gendarmerie de Chaumont a signé, fin 2023, un protocole de partenariat avec l’École de la police fédérale de Diez de manière à réaliser des échanges d’élèves et de formateurs autour de compétences d’intérêt partagé.

Enfin, l’Académie internationale de police de Brühl forme, entre autres, au français opérationnel en vue des projections de policiers allemands (police fédérale et polices des Länder) dans des pays francophones. Un ancien personnel français de l’UOFA, ayant l’expérience des OPEx, a, par deux fois, appuyé des formations auprès de cette académie.

À noter

Le CGMEx est à l’initiative d’un projet de coopération avec l’Académie internationale de police de Brühl en vue d’aguerrir nos officiers et sous-officiers aux nouvelles missions de Politique de sécurité et de défense commune (PSDC) de l’U.E. Dès que la convention sera finalisée, la gendarmerie pourra envoyer des personnels à ces stages qualifiants contre le détachement d’un instructeur français au sein de l’équipe d’encadrement de leur stage annuel francophone de prédéploiement PSDC-U.E. et ONU, d’une durée de quinze jours.

Roumanie

À Bucarest, l’École d’application des officiers de la gendarmerie roumaine organise des visites d’études pour ses stagiaires et forme ses instructeurs en France, à l’AMGN et au CNEFG. Membre du REFFOP (Réseau d’expertise et de formation francophone pour les opérations de paix), elle travaille également avec l’ambassade de France et l’Institut français à Bucarest mais aussi avec l’Organisation internationale de la Francophonie.

Le Cours supérieur international (CSI) de l’école d’application des officiers de la gendarmerie roumaine organise notamment un stage de formation pour les déploiements dans les opérations de maintien de la paix (stage labellisé ONU), délivré en langue française. Destiné à accueillir des officiers étrangers des pays francophones, il reçoit le soutien financier de l’Organisation internationale de la francophonie (OIF). La gendarmerie envoie un officier-stagiaire et un officier supérieur adjoint au responsable de cette formation.

À noter

L’Institut des études roumaines forme les officiers de la gendarmerie roumaine pour les missions ONU et U.E. dans les langues suivantes : anglais/français/roumain. Le CGMEx a identifié un partenariat possible avec cet organisme pour les formations francophones « ONU ».

Afrique

La gendarmerie contribue à armer les équipes d’instructeurs de plusieurs Écoles nationales à vocation régionale (ENVR) francophones, qui bénéficient à de nombreux pays africains. S’inscrivant dans la stratégie diplomatique française d’appui au renforcement des États et à la stabilisation des zones de crise, ce réseau d’écoles de formation des cadres, financées par la DCSD, participe à la montée en expertise des forces de sécurité des pays partenaires, à travers des enseignements majoritairement dispensés en langue française : École internationale des forces de sécurité (EIFORCES) au Cameroun ; École internationale de perfectionnement à la pratique de la police judiciaire (EI3PJ) à Djibouti ; Cours d’application des officiers de gendarmerie (CAOG) au Sénégal ; Académie internationale de lutte contre le terrorisme (AILCT) en Côte d’Ivoire : et, à venir, Académie internationale de lutte contre la criminalité environnementale (AILCE) au Congo-Brazzaville.

Participation à Francopol

La gendarmerie est partie prenante de Francopol, organisme de coopération créé en 2008 entre les services de police et les écoles de police de langue française, co-présidé par la Sûreté du Québec et la DCIS.

En 2021, Francopol comptait 67 organisations membres (dont des services de police et gendarmerie, des écoles ainsi que des centres de formation), réparties dans 18 pays : Belgique, Burkina Faso, Cambodge, Cameroun, Canada, Côte d’Ivoire, Espagne, France, Gabon, Haïti, Kosovo, Liban, Luxembourg, Macédoine, Niger, Monaco, Sénégal et Suisse.
À titre d’exemple, Francopol a publié, avec le soutien de l’OIF et en collaboration avec l’ONU, un guide intitulé « Sensibilisation aux opportunités professionnelles dans les composantes police des opérations de paix des Nations unies ». Cet outil est destiné aux formateurs et aux élèves des écoles de police et de gendarmerie des pays francophones, ainsi qu’aux responsables impliqués dans le déploiement de forces de sécurité intérieure dans les opérations de paix de l’ONU.

Les Brigades européennes et les Commissariats européens

Lors des grandes manifestations ou dans les lieux de forte affluence, il n’est pas rare de voir des gendarmes et des policiers étrangers aux côtés des forces de l’ordre françaises.
Depuis 2009, ce dispositif connaît un succès grandissant, tant pour l’envoi de gendarmes à l’étranger que pour la réception de renforts au profit de nos unités territoriales. Le fait de solliciter de manière croissante une ressource d’agents européens francophones incite tant les organisations que les personnels des forces de sécurité intérieure de l’U.E. à développer des compétences linguistiques dans notre langue.

Les retours d’expérience très favorables et la diversité des missions assurées (cavaliers, équipes cynophiles, LAD, renforts nautiques, etc.) contribuent à l’attractivité de ce dispositif.
Par cette présence conjointe, visible et rassurante sur la voie publique, cet appui, principalement destiné aux zones touristiques ou aux grands événements, est une illustration concrète, en interne comme en externe, de la coopération constructive qui unit les différentes FSI de l’U.E. et la gendarmerie nationale.

Ces missions permettent d’améliorer le service public de sécurité de proximité offert à nos concitoyens en déplacement à l’étranger, en levant la barrière de la langue et en favorisant la compréhension mutuelle.

Une Unité opérationnelle franco-allemande (UOFA) et bientôt franco-italienne (UOFI)

Créée en 2019, l’Unité opérationnelle franco-allemande (UOFA) fêtera très prochainement ses cinq ans d’existence. Vingt gendarmes français et vingt policiers de la police fédérale allemande utilisent les deux langues au quotidien dans leurs missions au contact du public, des administrations et des acteurs de la sécurité que l’unité est amenée à côtoyer. Ses membres s’entraînent donc logiquement dans les deux langues et ne cessent de développer leurs compétences linguistiques.

L’intérêt de la mission en unité binationale provoque une véritable émulation parmi les personnels de la police fédérale allemande, qui se forment à la pratique du français pour rejoindre cette unité attractive.

L’unité opérationnelle franco-italienne (UOFI), construite sur le même modèle (vingt gendarmes français et vingt carabiniers italiens), prévue dans le Traité du Quirinal, devrait être inaugurée prochainement.

À noter

Le CNFLIG a été en mesure de proposer plusieurs sessions de formation pour développer les compétences linguistiques au profit des gendarmes et policiers de la Bundespolizei allemande composant l’UOFA, et aujourd’hui des gendarmes et des carabiniers italiens appelés à armer la future UOFI. Ces formations favorisent l’acquisition d’une culture opérationnelle ainsi que d’un socle de connaissances techniques et tactiques communs. Ces modules mêlent étroitement la pratique de la langue à la réalisation d’exercices pratiques et d’entraînements opérationnels conjoints. Cette étape est également décisive dans la constitution de la cohésion du groupe.

Source: gendinfo.fr