• Quels sont les traitements concernés?
Le déremboursement des médicaments Aricept, Ebixa, Exelon, Reminyl (dont la commercialisation s’arrêtera en novembre 2018) ainsi que leurs génériques sera bien effectif dans quelques jours. Suivant les recommandations de la Haute Autorité de santé, la ministre des Solidarités et de la Santé Agnès Buzyn a confirmé l’information le 28 mai 2018 sur RTL. Le déremboursement sera effectif le 1er août comme le stipule l’arrêté publié vendredi 1er juin au Journal officiel.
Ces médicaments composés de différentes substances actives comme le donépézil chlorhydrate ou la galantamine appartiennent à la famille des anticholinestérasiques. Ils inhibent le fonctionnement d’une enzyme particulière qui serait à l’origine de la dégradation de l’acétylcholine, un neurotransmetteur stocké dans les neurones. Or l’acétylcholine qui permet la transmission d’informations entre les neurones serait dégradée chez les personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer. Les médicaments restaurent pour partie son action.
Une autre molécule, la mémantine, un antiglutamate, diminue quant à elle la concentration d’un neurotransmetteur, le glutamate, lui aussi impliqué dans la survenue et la progression de certains symptômes de la maladie. Quant à la rivastigmine, elle stimule certaines fonctions cérébrales chez certains malades.
• Pourquoi les dérembourser?
À usage restreint, utilisés par les spécialistes sous forme orale (ou proposé en patch pour la rivastigmine), ces traitements médicamenteux ne concernent pas tous les malades. Ils sont prescrits pour traiter les patients atteints d’un trouble neurocognitif dans ses formes légère ou modérément sévère.
Mais la communauté médicale reste divisée depuis de nombreuses années quant à leur intérêt médical. En agissant sur le déficit cérébral, ces différents médicaments amélioreraient la vie des personnes malades sans toutefois les guérir ou enrayer la progression de la maladie. Par ailleurs, ils ne sont pas dénués d’effets indésirables (digestifs, cardio-vasculaires ou neuropsychiatriques) au regard de leur modeste bénéfice. Les médecins ont d’ailleurs été invités par certaines instances professionnelles à ne plus prescrire les médicaments anti-Alzheimer en 2016.
Cette efficacité controversée dont le coût annuel est estimé en 2015 à plus de 90 millions d’euros pour l’Assurance-maladie a conduit à un déremboursement progressif. En 2016, la Haute Autorité de santé estime que ces traitements ne justifient pas une prise en charge de la Sécurité sociale.La commission de transparence de la Haute Autorité de santé qui évalue le service médical rendu des médicaments considère aujourd’hui que le service est « insuffisant, ce qui conduit de fait à un déremboursement de ces médicaments » – un remboursement déjà passé à 15% il y a deux ans.
• Que disent France Alzheimer et les sociétés savantes?
L’association France Alzheimer qui regroupe les familles de malades déplore ce choix. Elle estime que « compte tenu du reste à charge extrêmement élevé auquel sont confrontées les familles (plus de 1 200 euros/mois en moyenne), rares sont celles qui pourront, en sus de leurs dépenses actuelles, assumer les 30 euros mensuels équivalents au coût du traitement ». Elle s’inquiète aussi de la rupture du lien entre soignant et patient car « au-delà de la question de l’efficacité, la prescription des médicaments participait, en effet, grandement à maintenir un lien thérapeutique entre le médecin et le patient« . De leur côté, les sociétés savantes (la Fédération des centres mémoire, la Fédération française de neurologie, la Société française de neurologie, la Société française de gériatrie et de gérontologie, et la Société francophone de psychogériatrie et de psychiatrie de la personne âgée) estiment que des « méta-analyses sur ces médicaments symptomatiques (…) ont prouvé leur efficacité sur la cognition dans la maladie d’Alzheimer, la maladie à corps de Lewy et la démence de la maladie de Parkinson ». Et de préciser que l’effet est certes d’une « amplitude modeste » mais qui « est démontrée ».
Les dernières recommandations de la HAS publiées le 25 mai 2018 évoquent quant à elles une meilleure prise en charge des patients. Elles mettent en avant un accompagnement plus global des malades et soulignent le bénéfice des thérapies non médicamenteuses comme la rééducation par la kinésithérapie, l’ergothérapie, l’orthophonie et les thérapies psycho-comportementales. Des traitements qui contribuent à ralentir les troubles cognitifs.
Plus de 850 000 personnes en France sont touchées par la maladie d’Alzheimer ou une maladie apparentée.
Source: notretemps.com / Crédit photo: © D.R.