Garder une tension équilibrée est un facteur important pour rester en forme et diminuer le risque d’infarctus, d’AVC et de troubles cérébraux.

L’hypertension artérielle (HTA) touche près d’un adulte sur trois en France, dont un sur deux après 60 ans, et la situation ne s’est pas améliorée récemment. Le constat des cardiologues vient d’être confirmé par l’enquête Esteban publiée en avril 2018. Or l’hypertension constitue un facteur de risque majeur de maladie cardio-vasculaire. Elle est la première cause d’accident vasculaire cérébral (AVC).

« Insidieusement, au fil des ans, elle fatigue le cœur et abîme les artères, affectant les reins, le cerveau, voire la rétine », souligne le Pr Jean-Philippe Baguet, cardiologue à l’île de la Réunion. « La pression dans un tuyau dépend de sa capacité élastique: plus le tuyau se dilate, moins la pression à l’intérieur est forte. Pour résister à la pression du sang, les artères se rigidifient et leur paroi s’épaissit. Un cercle vicieux qui réduit encore l’espace disponible pour laisser passer le flux sanguin. » D’autant que, parallèlement, l’hypertension contribuerait au développement de dépôts graisseux sur les parois des vaisseaux qui rétrécissent encore leur calibre. 

Longtemps les femmes ont semblé être épargnées, à tort. « Après la ménopause, elles sont même plus souvent concernées que les hommes, souligne le Pr claire Mounier-Véhier, présidente de la Fédération française de cardiologie et cardiologue au centre européen de l’hypertension du CHU de Lille. Celles qui ont accouché d’un bébé de plus de 4kg ou de moins de 2,5kg, qui ont eu de l’albumine ou une poussée de tension durant leur grossesse, doivent être très vigilantes. » et accepter une prise en charge si besoin: l’enquête Esteban a pointé que la proportion de femmes avec une HTA traitée a baissé de 72,3% à 53,2% entre 2006 et 2015, notamment chez les 65-74ans. 

Il est vrai que les symptômes de l’HTA sont peu spécifiques: maux de tête au réveil, fatigue, troubles de la concentration. Lorsqu’ils apparaissent, il est souvent bien tard. D’où l’importance de faire mesurer sa tension au moins une fois par an à partir 40ans et de réagir si elle n’est pas comprise entre 120/70 et 140/90m MHG. « Tout chiffre trop élevé au cabinet doit être confirmé par des mesures à domicile », rappelle le Pr Claire Mounier-Véhier. Une augmentation légère peut être corrigée sans médicaments. « Mais dès que c’est nécessaire, il ne faut pas attendre pour le prendre », insiste le Dr Nicolas Postel-Vinay, de l’hôpital européen Georges-Pompidou (Paris). En cinq ans, il a réduit de moitié le risque d’insuffisance cardiaque et de 40% celui d’AVC. C’est dire l’importance d’une bonne hygiène de vie, qui pourra retarder ou diminuer le recours à un traitement. En adoptant de bonnes habitudes, il est possible de limiter les risques. 

• Les amis à courtiser 

1) L’alimentation méditerranéenne: efficace à tout âge 

– Pourquoi? Parfaitement équilibré, ce régime évite les excès. il apporte tous les éléments associés à une pression artérielle plus basse: le potassium, disponible dans les légumes secs (haricots blancs, lentilles…) ou à feuilles vertes (brocolis, épinards, choux, courges…), la vitamine c et les fibres issues des fruits. Il fournit aussi les « bonnes graisses » des fruits secs et des poissons. Sa richesse en antioxydants aide à conserver la bonne élasticité des artères. 

– La bonne pratique à adopterDes végétaux à volonté, ainsi que des féculents et des légumes secs quasiment à chaque repas (première source d’énergie dans cette alimentation); des huiles végétales (olive, colza, noix) préférées au beurre; des poissons et fruits de mer au moins deux fois par semaine. À l’opposé, peu de viande et de sucreries, de la volaille ou des œufs une à trois fois par semaine, du fromage et des yaourts une à sept fois par semaine.

– Le bénéfice attendu. Des études l’ont prouvé: l’alimentation est le facteur protecteur numéro 1. cela va à l’encontre d’une fausse croyance qui voudrait que la tension artérielle s’accroisse inéluctablement avec l’âge. 

– Ce que dit la science. L’étude des sept pays a montré que les populations du pourtour méditerranéen ont une meilleure santé cardio-vasculaire. la Lyon Diet Study, dirigée par Michel de Lorgeril, a démontré pour sa part qu’après un premier infarctus, ce type de régime réduit de 81% le risque de décès d’origine cardio-vasculaire. 

2) Le contrôle du poids: quelques kilos suffisent 

– Pourquoi? le surpoids est l’une des causes majeures d’hypertension, notamment lorsqu’il prend la forme de « bouée abdominale ». 43% des adultes français sont dans ce cas, or quelques kilos en trop suffisent à accélérer le vieillissement des vaisseaux. 

– La bonne pratique à adopter. Bouger davantage et corriger les excès à table, en évitant les portions pantagruéliques ou de reprendre de chaque plat. Une bonne idée: commencer par diminuer le sucre souvent en cause dans le surpoids. 

– Le bénéfice attendu. Perdre 5 ou 6kg peut suffire à normaliser une hypertensionou à alléger le traitement médicamenteux.

– Ce que dit la science. Des chercheurs du Connecticut ont sélectionné 12 études incluant 409707 participants (« American Journal of Cardiology », mai 2014). Résultat: les personnes qui buvaient des boissons sucrées (sodas, jus de fruits, alcool) augmentaient de 26% à 70% leur risque d’hypertension par rapport à celles qui n’en consommaient pas. 

3) L’activité physique: un peu chaque jour 

Pourquoi? Le surpoids et l’hypertension sont très liés à la progression de la sédentarité. Or les bienfaits de l’activité physique sont immédiats. « Bouger détend les vaisseaux grâce à une double action, explique le Pr claire Mounier-Véhier. Cela diminue les substances inflammatoires qui rigidifient les artères et, en même temps, l’organisme secrète des hormones qui les dilatent. » 

La bonne pratique à adopter.

Plutôt que de se lancer dans un effort inhabituel intense qui peut s’avérer dangereux pour le cœur, il suffit de suivre les recommandations de la Fédération française de cardiologie (www.fedecardio.org): au moins trente minutes d’activité par jour, au moins cinq jours par semaine. Mais des effets favorables ont été démontrés, même à des doses inférieures. Un peu, c’est déjà mieux que pas du tout! À noter qu’il existe des organismes accompagnant la remise en forme avec des activités adaptées à l’âge et aux capacités de chacun, y compris en cas de maladie ou de handicap. Rens: www.sportspourtous.org ou Form + sur www.fscf.asso.fr 

Le bénéfice attendu. Si un décret de mars 2017 permet la prescription de « sport sur ordonnance », c’est parce qu’il n’y a pas de meilleur médicament, notamment contre l’hypertension. C’est parfaitement logique: le cœur, qui est un muscle, devient d’autant plus performant qu’il est entraîné. À chacun sa préférence, randonnée, vélo, natation, Pilates, tai-chi, yoga… Autant d’activités qui aident aussi à contrôler le poids et à diminuer le stress. L’OMS (Organisation mondiale de la santé) estime que 75% des maladies cardio-vasculaires sont évitables grâce à un changement du mode de vie, l’augmentation de l’activité physique figurant en première ligne. 

Ce que dit la science. « Un effort d’endurance d’intensité modérée maintenu durant vingt minutes au moins fait perdre un demi- point de tension artérielle », indique le Dr Jean-Claude Verdier, cardiologue du sport et cofondateur de l’Institut cœur effort santé (ICES). Aussi efficace qu’un médicament!

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4) Les disciplines antistress: efficaces immédiatement 

Pourquoi? Peur, contrariété ou toute autre forme de stress entraînent une sécrétion de cortisol, cette hormone qui induit une élévation de la pression sanguine. Quand le système nerveux sympathique est ainsi stimulé de manière quasi permanente, en cas de stress chronique, de tempérament anxieux ou colérique, cela détériore les parois des artères qui deviennent plus épaisses et perdent en souplesse. 

La bonne pratique à adopter. S’initier à une discipline pour « débrancher »: méditation (les livres de Christophe André ou l’application « Petit bambou » sur internet sont une option facile pour débuter) ou relaxation, yoga (voir le livre du Dr Lionel Coudron, Yoga-thérapie : soigner l’hypertension artérielle, éd. Odile Jacob) ou encore cohérence cardiaque (applications gratuites sur internet): quelques minutes de pratique quotidienne suffisent à baisser nettement la tension avec des effets immédiats, qui se pérennisent avec la régularité. 

Le bénéfice attendu. « Toute action diminuant le stress, physique ou psychique, est bonne pour stabiliser la tension », confirme le Pr Jean-Philippe Baguet. 

Ce que dit la science. Dans une étude parue en 2013 (« Psychosomatic Medicine: Journal of Biobehavioral Medicine ») le Pr Joël hughes de l’université de Kent State, dans l’Ohio (Etats-Unis), a prescrit des séances de méditation en groupe et des cours de yoga à raison de 2h30 par semaine à des patients présentant une légère hypertension. ces activités étaient à compléter par des temps de relaxation à domicile. Deux mois plus tard, leur tension systolique (pression dans l’artère au moment où le cœur se contracte) avait baissé de 5mm de mercure, passant par exemple de 145 à 140, un résultat suffisant pour retarder la prescription de médicaments. 

• Le sommeil: dormir assez et sans apnées 

Pourquoi? « Les valeurs de la pression artérielle sont au plus bas durant la nuit. c’est pourquoi dormir moins de 7 heures peut être un facteur d’hypertension », explique le Pr Jean-Philippe Baguet. « De même un sommeil perturbé, par le bruit des voisins, ses propres ronflements ou ceux du conjoint, empêche d’accéder à des phases de récupération suffisantes. » L’apnée obstructive du sommeil est particulièrement surveillée car deux tiers des apnéiques sont hypertendus.

La bonne pratique à adopter. Prendre son sommeil au sérieux. se réveiller fatigué ou lorsque le conjoint s’inquiète de pauses respiratoires nocturnes doit inciter à dépister une apnée du sommeil. Même chose lorsque l’hypertension résiste aux médicaments. « Quand l’organisme lutte pour être oxygéné, cela entraîne une décharge d’adrénaline qui spasme les artères, explique le Pr Baguet. Les cycles se répétant toute la nuit, la tension suit le tracé des montagnes russes. » L’apnée se soigne par le port d’un masque de ventilation qui maintient les voies aériennes ouvertes durant la nuit. 

Le bénéfice attendu. Une tension qui se stabilise.

Ce que dit la science. L’enquête Flahs menée par le comité français de lutte contre l’hypertension montre que l’apnée du sommeil est 2,5fois plus sévère chez les personnes hypertendues par rapport à la population générale. et qu’un patient apnéique sur deux est hypertendu (enquête CFHTAT avec Kantar Health France en 2010 auprès de 3718 adultes de 35ans et plus). 

Source: notretemps.com / Crédit photo: © D.R.